mercredi 31 août 2011

Science fantasy

Il y a une vingtaine d'années on a beaucoup critiqué Jacques Goimard lorsqu'il a segmenté la collection Pocket SF. Et c'est l'appellation science fantasy qui a fait couler le plus d'encre. je suis maintenant convaincu que ce grand monsieur de l'édition SF, en bon visionnaire, a eu raison trop tôt. Il avait presque vingt ans d'avance en fait. En 2002 le critique américain Gabriel Chouinard décrivait la science fantasy comme la voie royale de la SF, celles qui était le plus susceptible d'attirer un grand lectorat.
Et je crois que le temps arrive où la science fantasy est prête à devenir une niche, une appellation de plus. Lorsque des romans qui auraient été estampillé SF sans problème il y a vingt ans se retrouve dans la sélection finale du World Fantasy Award c'est un premier signe. Il y avait aussi cet article de NK Jemisin qui expliquait que la fantasy pouvait aussi se conjuguer au futur. C'est nouveau. Avant un roman qui se déroulait dans le futur était de la SF. La question ne se posait même pas.
Je ne serais pas surpris que dans deux ou trois ans l'étiquette science fantasy prenne une réelle autonomie et que l'on voit se développer une littérature à mi chemin entre les deux genres. Quand on sait que la fantasy est touchée au même titre que la SF par le steampunk et que l'on parle de steam fantasy, sans oublier le courant New Weird qui introduit très souvent des éléments de SF dans la fantasy.
En même temps l'on a à faire à une science fiction qui comme je l'ai dit précédemment a tendance à restreindre son champ. L'existence d'une étiquette science fantasy pourra permettre de publier certaines oeuvres dont la science fiction du moment ne veut pas entendre parler mais qui sont susceptibles de trouver un public.

lundi 15 août 2011

Les espoirs de l'imaginaire : Philippe Déniel

1 - Peux tu te présenter en quelques mots ?
Gasp, je suis super mauvais dans ce registre là. Heureusement, cela a été déjà fait pour outremonde, alors je vais outrageusement réutiliser ce qui a déjà été fait (http://outremonde.fr/index.php?/auteurs/23-deniel-philippe). C'est nerveux, je déteste parler de moi même (je laisse ce privilège à Jules César et à Alain Delon).

2- Comment es tu venu à l'écriture ?
Réponse standard numéro 54 ter : par hasard ;-) . Plus sérieusement, j'ai pratiqué les jeux de rôles pendant des années durant mes études et après ensuite. Cela devint difficile de pratiquer une fois dans la vie active, alors au lieu d'écrire des scénarios de JdR j'ai écrit des nouvelles, sans vraiment les finir. Et puis courant 2002, j'ai envoyé un texte au concours organisé par le site ActuSF.com (qui s'appelait alors encore "la 85ème dimension" à l'époque) sans y croire, juste pour tenter le coup. A ma grande surprise j'ai reçu un "prix spécial du jury" pour ce texte. Et cela m'a encouragé à continuer, tout simplement.

3- Tu aimes souvent mêler SF et fantasy dans tes textes. Te considères
tu comme un auteur de science fantasy ?

Pas du tout. J'aime juste mélanger les genres. J'ai mélangé western et mythologie, revisité des contes de fées, alors mêler la fantasy e la SF n'est qu'un mélange de genres comme un autre :-) .

4 - Tu empruntes volontiers des motifs mythologiques. D'où te vient ce
goût pour les mythes ?

D'ulysse 31 !!!! Quand j'étais tout gamin, cette série a été diffusée pour la première fois et elle tranchait beaucoup avec les dessins animés japonais qui pullulaient dans les émissions pour enfants (Albator et Goldorak en tête). Cette série reprenait des thèmes mythologiques je me suis donc intéressé au sujet et je suis tombé dedans... La mythologie grecque est si vaste. Après je me suis intéressé à d'autres mythologies et à des contes d'autres cultures. Ce sont des histoires "archétypes" que l'on retrouve partout, tous les récits qui existent s'y rattachent d'une manière où d'une autre.

5 - Quels sont tes projets littéraires ?
Concrètement, continuer à écrire des nouvelles, c'est l'objectif number one (parce que raconter des histoires, on a beau dire, mais c'est vraiment fun ;-) ). J'ai participé à un supplément de Jeu De Rôles récemment (ça s'appelait "Peplum Soda" et c'est une extension pour "Brain Soda" qui est un jeu aussi original que déjanté) et j'en prépare une seconde. Sinon (mais là c'est encore du "top secret") j'aimerai beaucoup scénariser une BD. A part cela, le projet d'écrire un truc "bien plus long qu'une nouvelle" me trotte de plus en plus dans la tête ces derniers temps. Je risque probablement de passer à l'acte un de ses 4 matins ;-) .

samedi 6 août 2011

Changement d'époque

La SF serait elle en train de changer d'époque ? On peut le croire. L'époque précédente démarré avec les cyberpunks qui avait ancré le genre dans un paradigme technologique est en train de s'achever : se sont succédés les cyberpunks, le retour de la hard science dans les années 90, la singularité, le transhumainsme. A coté de cela on voit apparaître un discours post moderne de déconstruction du genre avec des auteurs comme Robert Charles Wilson. Les futurs sombres sont à la mode : la critique de l'idéologie néolibérale domine le milieu. On peut d'ailleurs se demander si à force de dénoncer cette idéologie, les auteurs n'ont pas contribué à la rendre possible, à l'actualiser, à lui permettre de s'ancrer dans le champs des possibles. Tous ces courants sont certes différents les uns des autres mais ils ont en commun deux choses : la volonté d'ancrer le genre dans le réel et de le détacher d'un imaginaire de fiction et d'évasion, de mettre au centre du récit l'idée (la sf littérature d'idées, l'idée pouvant être concept, idéologie...).
Les années 2000 font souffler un vent nouveau :
- Apparaissent des anthologies comme Shine qui veulent faire la part belle à des futurs optimistes. Cette anthologie n'est pas un épiphénomène puisque l'on en a vu d'autres comme Seeds of change ( sur les changements de civilisation), Wild humanists ( comment l'écologie peut changer la société) ou encore Little mosque amongs the stars (imaginer une vision positive de l'islam dans le futur). Bref des anthologies qui tranchent avec les discours pessimistes sur l'avenir de nos sociétés. Une SF qui arrête de n'être qu'un vecteur de dénonciation du présent pour véritablement imaginer des futurs.
- Le courant Scifi Strange mené par Jason Sandford fait la part belle aux spéculations basées sur les sciences humaines et n'hésitent pas à mener le genre dans ses derniers retranchements : poésie, baroque, décadence.... Un des courants les plus enthousiasmant de ces dernières années. Là aussi, des auteurs qui innovent en étant dans la continuité de ceux qui les ont précédés. Ils se réclament dans la ligne d'une New Wave élargie et dans le fil de la nouvelle SF américaine des années 70.
- On voit des auteurs appartenant à des minorités publier ainsi que des anglophones non anglo saxons originaires de tous les continents. On a une diversification et une mondialisation qui amène un sang neuf.
- Le leader éditoriale de la SF anglosaxonne est John Joseph Adams qui a pris le relais de Helen Datlow qui occupait jusque là le rôle de principal leader littéraire et éditorial. Adams a une vision beaucoup plus large des littérature de l'imaginaire allant de la hard science jusqu'à des formes extrêmement littéraires, s'intéresse aussi bien à la SF qu'à la fantasy. Du space opera à la fantasy épique, il a publié des anthologies allant des plus classiques au plus surprenantes. Mais il dirige également deux revues (Lightspeed et fantasy) et occupe les fonctions de directeur littéraire de Prime Books.
- Quant à la SF populaire si elle est étouffée par des licences commerciales aux USA, on a vu par contre ces deux dernières années de nombreux space opera publiée en Grande Bretagne. Comme les Britaniques avaient dans les années 90 fait évoluer la fantasy épique, on a des raisons de penser qu'ils feront la même chose avec le space opera.

Bref autant de directions qui nous montre que l'époque est en train de changer. Nous ne vivons pas une crise de la SF, mais l'évolution nécessaire d'une littérature essoufflée après plus de vingt ans à renier une partie de sa nature qui retrouve enfin cette identité confisquée par une partie du fandom soucieux d'en faire un espace de réflexion et non plus une vraie littérature d'imagination. Après deux décennies et demi de restriction du domaine du genre on voit arriver autant de facteur d'élargissement qui rendent optimistes pour les années à venir. Ce n'est que génése de quelque chose, mais une chose est sûre ce n'est pas prêt de s'arrêter. Vivement la suite.
On ne peut être que déçu par les prises de position des leaders éditoriaux du genre comme Serge Lehman faisant l'apologie de l'orientation postmoderne avec son rattachement de la SF à la métaphysique, ou la défense et illustration de la hard science comme voie royale par certains. Heureusement chez nous aussi des auteurs commencent à faire leur trou comme autant de petites souris patientes prêtes à creuser un vaste chantier.

vendredi 5 août 2011

Les espoirs de l'imaginaire : David Chauvin

1 Peux tu te présenter en quelques mots ?


J'attends l’âge ingrat et bien trop élevé de 32 ans, celui auquel on est censé vivre dans un pavillon phœnix ou un appart de standing et entretenir une ribambelle de gamins. Sauf que je viens d’une belle région bien trop marquée par la vieillesse et la mort : la Manche (pays de marbreries et de granit), et donc je tâche de rester jeune dans toutes mes actions. Je vis à Tours une jolie ville à taille humaine, depuis 1986, autant dire la préhistoire pour bien des lecteurs du présent blog.

Après le lycée, j’ai étudié l’histoire et l’archéologie durant cinq ans (DEA devenu Master 2) avec une spécialité en histoire romaine, avant de connaître un parcours pour le peu erratique. Aujourd’hui, je survis en accomplissant un travail très physique afin de vivre mes passions, moi qui ait toujours exécré le sport. Au fond de moi, j’en tire une certaine fierté.

Que dire de plus sur l’homme que je suis ? Je suis un être plutôt taciturne et colérique qui ne supporte pas la bêtise ambiante et a tendance à se retrancher dans se univers, une sorte d’enfant attardé qui n’a pas surmonté le syndrome de Peter Pan.

J’aime le métal (qu’il soit brutal ou harmonique), la musique des années 80 et même le vieux rock des décennies d’avant. Je suis un infatigable collectionneur de figurines et je passe beaucoup de temps à les réparer et à les repeindre, comme si je refusais la décadence inéluctable de toutes choses.

Je suis un gourmand invétéré qui absorbe de grandes quantités de viandes, fromage et alcool sans trop faiblir, on ne vit qu’une fois…



2 Comment es tu venu à l'écriture ?



Il a fallu un certain temps, pour ne pas dire un temps certain à me décider vraiment (à 26 ans pour être exacte, période noire de chômage, d’ennui et de frustrations).

J’avais bien publié quelques textes étant petits dans des bulletins municipaux : j’ai très vite eu une certaine affinité avec la langue française et ses possibilités. Pourtant, un mélange de manque de confiance et de modestie mal placée m’a longtemps empêché d’écrire de vraies histoires.

J’ai, durant mes jeunes années de lycée et de Fac noirci des cahiers entiers de campagnes et de scénarios de jeu de rôle : il faut dire que je m’adressais à des joueurs exigeants qui en avaient vues d’autres ; de plus, je me plaisais dans ce rôle de scénariste de série à suspens et à grand spectacle. Du jeu de rôle, je suis logiquement passé à la création d’univers et de récits: le temps et le travail que je passais à établir des campagnes pour un groupe restreint, je pouvais l’employer à faire plaisir à un plus large public, les idées de personnages, de légendes ou de chimères quoi m’obsédaient, je pouvais les faire naître sur le papier.



3 Ton principal projet littéraire est un cycle de récits fantastiques intitulé Contes de l'Outreplan ? Peux tu nous présenter cet ambitieux projets et la mythologie qui le sous - tend ?



Les Contes d’Outreplan sont mon plus ancien projet : l’idée était de réunir un nombre « magique » (pour l’instant dix, mais je monterai sans doute à douze ou treize) de petites histoires horribles et grinçantes ayant attrait à un thème commun : les autres royaumes d’existence, leurs habitants et leurs incursions sur notre propre monde tangible.

L’univers s’inspire un peu de « La Quatrième Dimension » tout en introduisant la notion d’êtres et de pouvoirs d’« outre-plan », les premiers considérant souvent les humains comme des nuisibles à éliminer, les seconds étant souvent l’objet de quête des illuminés les plus ambitieux.

Certains scientifiques se figurent un monde non pas en trois ou quatre dimensions mais en dix ou plus : j’ai essayé d’imaginer ces royaumes et leurs habitants monstrueux, puis leurs préoccupations, leurs agissements sur Terre et leurs conflits internes, leur rôle dans l’Histoire.

On peut imaginer toutes sortes de récits mais dans la plupart des cas, mes héros sont des hommes et des femmes qui prennent conscience de l’horrible vérité et tâchent de lutter contre la tyrannie des monstres qui cherchent à tuer ou à pervertir tout ce qui vit. Dans mon univers, certaines factions secrètes cherchent à résister aux incursions d’outre-plan ou au contraire, prennent partie pour telle ou telle créature charismatique : sans compter celles qui se sont introduites dans les cercles de la politique, de l’économie ou des médias et qui agissent en secret.



4 Peux tu nous présenter ton projet de cycle de SF, Les enfers miniatures ?



Je m’intéresse effectivement aussi à la SF, plus à l’aspect « planet opera » qu’aux interrogations technologiques et écologiques d’ailleurs. Dans les « Enfers miniatures », la galaxie présentée est celle qui a été peuplée par une humanité qui a fui une menace aujourd’hui oubliée et dont la diaspora s’est multipliée pour créer une infinité de mondes et de cultures. Mais comme je suis un éternel pessimiste, cette galaxie est minée par les conflits, l’obscurantisme, la pollution, et les intérêts égoïstes. En toile de fonds, une grande guerre se prépare entre la Croisade Rédemptrice de Spartàn, qui entend remodeler l’humanité et le Pacte unilatéral de l’Union, dirigé par le « Grand frère » Gaédien : une forme de Seconde guerre mondiale à l’échelle galactique : avec son lot de haines, de propagande, de combats et de désastres. Pendant ce temps, certaines civilisations non-humaines conspirent pour en finir avec cette espèce qui se reproduit et ravage tout sur son passage, comme un nuage de sauterelles : leurs cultures ancestrales ne peuvent certainement pas endurer plus longtemps cette invasion ?

Mon premier projet de roman dans les « Enfers miniatures » s’intitule « Guyana Sunrise » et met en scène une violente révolte pénitentiaire sur le petit monde pauvre et forestier de Guyana, devenu camp de redressement pour les grandes puissances de l’Union. Dans un deuxième projet intitulé « Blockhaus », un groupe d’explorateurs est confronté à l’enfer qu’est devenue Thyatire, planète berceau de la fameuse Croisade rédemptrice. Enfin dans « La petite fille aux allume-gaz », je parle de l’empire déclinant d’Eboria, furieusement proche de notre Europe, et gangréné par la pauvreté, la violence urbaine et le racisme.



5 De même peux-tu nous détailler tes divers projets en fantasy ?



Lorsque je me suis lancé dans l’aventure improbable de l’écriture, j’avais deux choses en tête : les « Contes d’Outre-plan » mais aussi un cycle de fantasy mettant en opposition notre monde et un autre : Nékroôs, un monde médiéval-fantastique servant de prison aux neuf démons, des créatures qui manquèrent de détruire la galaxie autrefois. Dans le cycle de Nékroôs, une adolescente de notre Terre est précipitée dans ce monde primitif et apprend à retrouver ses véritables pouvoirs pour entrer en résistance contre les monstres qui tentent de sortir de Nékroôs pour achever leur tâche de destruction dans notre univers. C’est un vaste projet, avec un univers aussi détaillé que la Terre du Milieu de Tolkien ou l’Age hyborien de Howard, aussi vais-je mettre un certain temps à le mettre au point.

Parallèlement, je bosse sur des univers fantasy autres et plus proches de notre Terre, plus inspirés de la véritable histoire de la Terre ou des Contes de fées revisités.



6 quelles vont être tes prochaines publications ?



Difficile à dire, je dois mes premières publications de nouvelles (une dizaine en format web) à des appels à texte, c’est un jeu un peu grisant, mais à double tranchant, dont je suis revenu ces derniers temps : mes propres projets ne pouvant supporter de trop entrer dans des cases ou des critères de temps et de limites de signes. Je vais tâcher de travailler encore plus dur et de m’imposer auprès des éditeurs afin d’obtenir le Graal suprême : la publication papier, la lourde pression de la presse sur la douceur du support léger.