mercredi 10 décembre 2014

Casual reader contre hardcore reader

Comparer le marché des littératures de l'imaginaire à celui des jeux vidéos peut sembler osé mais est finalement assez pertinent. Dans les deux cas l'on a une casualisation du marché.
Comme dans les jeux vidéo les littératures de l'imaginaire ont délaissé certains genres comme le space opéra pas assez formatable dans une démarche de casualisation. Cette casusalisation peut prendre plusieurs formes. Il s'agit ici d'essayer de séduire le grand public ( qui n'existe pas d'ailleurs) et donc rendre abordable  la culture de l'imaginaire  à des publics qui n'y sont pas forcément sensibles au sens large. Cette casualisation a déjà existé par le passé et concernait un nombre d'oeuvres limitées.
L'explosion de la bit lit est liée au désir des éditeurs de pénétrer le marché de la grande distribution. On a utilisé la fantasy urbaine comme cheval de Troie car c'est un sous genre qui développe des intrigues contemporaines proches du consommateur lambda ou plutôt de la consommatrice car ici c'est la ménagère qui est la cible.
Une autre stratégie est de cibler les lecteurs de blanche pour leur faire lire de la SF ou de la fantasy. C'est une stratégie qui a été pas mal développée par Lune d'Encre, notamment en mettant l'accent sur Robert Charles Wilson, auteur qui justement vise un public de casual readers haut de gamme. D'ailleurs ce qui est intéressant avec Lune d'Encre, c'est que quand ils essayent de revenir vers de l'imaginaire plus coeur de cible le succès n'est pas toujours au rendez vous. Comme si l'étiquette casual de la collection suffisait à en détourner une partie des hard core readers.
Mais il y a d'autres démarches dans la casualisation comme la thrillerisation. Utiliser la forme thriller c'est utiliser le langage hollywoodien dominant. Par exemple loin du renouveau du space opéra annoncé, l'Eveil du Léviathan de James A Corey est avant tout un thriller spatial. Récemment le roman, Seul sur Mars de Andy Weir a été proposé par Bragelonne dans sa collection Thriller.
Mais la fantasy n'est pas en reste. On peut écrire de la fantasy épique pour casual readers, ça donne l'épée de vérité de Terry Goodkind. Mais on peut aussi écrire une fantasy plus relevé dans la même démarche de casualisation, et ça donne Le trône de fer de GRR Martin. C'est pour cela que le succède de l'adaptation télévisée de la saga de Martin ne profite pas à la fantasy en général. Parce que c'est de la fantasy pour grand public qui ne cherche pas forcément des mondes secondaires très travaillés, des éléments fantastiques ou imaginaires très développés, ou des grandes batailles, des constructions anthropologiques complexes mais qui se contente d'intrigues politiques tortueuses dans un univers qui reprend à 90 % des éléments du monde médiéval occidental et qui y rajoute 10% d'éléments personnels.

dimanche 7 décembre 2014

Les espoirs de l'imaginaire : Romain Lucazeau

C'est au tour de Romain Lucazeau, auteur ambitieux, habitué des sommaires depuis des années de se prêter à l'exercice. 

1- Peux tu te présenter en quelques mots ?
Je suis né en 1981. J'ai été professeur de philosophie et de science politique. Puis je suis devenu consultant en stratégie. Une bonne part de mon métier consiste à faire de la prospective à moyen ou long terme. Le dernier rapport que j'ai écrit portait, par exemple, sur l'effet de l'automatisation sur le marché de l'emploi français. La SF et la vraie vie se rejoignent parfois un peu.

2 - Comment es tu venu à l’écriture ?
J'ai été, et suis toujours, un gros lecteur de science-fiction et de fantasy. En quittant le monde universitaire, en 2007, je me suis senti libéré d'un certain esprit de sérieux. Puisque je n'étais plus sensé produire des kilotonnes d'articles pédants, je pouvais m'amuser un peu. Mes premiers textes reflètent cet état d'esprit léger : des pochades, comme on les a qualifiées, qui trouvaient preneur – ce dont je m'étonne encore.
En même temps, j'avais le souci de continuer à philosopher, mais par derrière, pour ainsi dire. J'apprécie beaucoup l'œuvre de Julien Gracq, qui faisait de la géographie en catimini, par exemple dans le Rivage des Syrtes, ou Michel Tournier, dont les romans sont truffés de références philosophiques. Je soupçonne Damasio de deleuzisme souterrain, également, en particulier dans La Horde. A partir d'un moment, j'ai également produit des textes plus sérieux, qui cherchaient à mettre en musique, pour ainsi dire, des problématiques philosophiques. J'ai également écrit des commentaires philosophiques de thèmes "SFF", dont la plupart sont parus chez Brins d'Eternité, au Québec.
Il y a une autre influence plus essentielle, qui m'a beaucoup déterminé dans mes choix d'écriture : une conférence donnée par Serge Lehman à Normale Sup quand j'y étais moi-même élève. J'éprouve une admiration sans bornes pour sa conception de la science-fiction comme continuation de la métaphysique. J'y consacre d'ailleurs un article, qui paraîtra bientôt dans une revue, Oscillations.
J'ai assez rapidement récolté quelques prix pour certaines de mes nouvelles, dont les Imaginales d'Epinal, en 2010, ce qui m'a poussé à continuer.

3 - Peux tu nous parler de Latium, le projet de roman sur lequel tu travailles depuis quelques années ?
En 2010, donc, s'est imposée l'idée d'un roman. Il prenait racines dans certains de mes textes courts, en termes surtout d'atmosphère et de références. J'ai écrit une espèce de synopsis en trois mois, et puis, cinq ans après, je suis encore dedans. Il est devenu obèse, et malgré toutes nos séances d'exercice en commun, il ne veut pas maigrir.
Il y a dans ce roman une ambition que j'ai esquissée dans un article pour ActaestFabula, et qui m'a valu des volées de bois vert : la nécessité de ressaisir, au sein des genres de l'imaginaire, un matériau culturel qui est celui, pour faire vite, de la culture classique, à l'opposé des clichés qui verrouillent le genre et le réduisent à une production pour connaisseurs, souvent truffée de second degré ou de clins d'oeil.  

Le roman se déroule après l'extinction de l'humanité, qui a laissé derrière elle des intelligences artificielles – rendues folles par la disparition de leurs maîtres et créateurs. Mes personnages sont des êtres cornéliens, soumis à une programmation d'airain et en même temps rongés par des désirs de liberté et de quiétude. Leur univers est un mélange de space-opera débridé  et d'antiquité grecque et latine. Ce sont des princes et des princesses du théâtre classique transplantés dans l'espace, en somme.

4 - Quels sont tes autres projets littéraires ?
Prendre des vacances littéraires, après avoir terminé ce pavé.

Produire une série de nouvelles sur l'univers de Latium. Ecrire un autre pavé, qui aura pour titre Urbs.

mardi 2 décembre 2014

Les espoirs de l'imaginaire : Solenne Pourbaix

1- Peux tu te présenter en quelques mots ?
Je n'aime pas parler de moi. J'ai bon là? Ca marche comme présentation? Plus sérieusement: Solenne, 29 ans, 1m70, poil soyeux et truffe humide.... Non ok, je sais vraiment pas quoi dire...
2 - Comment es tu venue à l'écriture ?
Au risque de paraitre très pédante, c'est parce que je m'ennuyais dans mes lectures. Je ne trouvais que des choses stéréotypées à mort. Femmes fragiles à sauver, méchants contre gentils... J'étais très frustrée, alors je me suis dis un jour "tiens, au lieu de rêver des trucs dans ma tête, je vais les écrire". Je l'ai fais. Puis j'ai fais lire aux copains. Puis à d'autres gens. J'ai été conseillée, encouragée, j'ai commencé à me dire que peut-être il serait de bon ton de m'y mettre sérieusement au lieu de travailler en improvisant chapitre après chapitre et c'était parti. La machine était lancée. (j'en profite du coup pour remercier Tony Beaufils, de Naheulband et Qantice, qui m'a été d'un grand soutien et d'une aide précieuse!! Tony, si tu nous regarde... *clin d'oeil et doigt pointé vers l'écran* )  Après, si je me suis acharnée là dedans, il y a deux raisons. La première, d'un pragmatisme décevant: j'avais le temps; la deuxième: mes histoires semblent plaire à des gens, alors si en plus de me faire plaisir, je peux faire plaisir, c'est tout bénèf!
3 - Tu vas bientôt publier un roman chez Rivière Blanche, "les promesses d'Atro City". Peux tu nous en parler ?
Alors Les Promesses est, justement, mon tout premier roman écrit "sérieusement". C'est l'histoire de Jan (prononcer "Yan", merci pour lui), un combattant dont le fils a été pris en otage par un dirigeant puissant d'une ville post-apo. Ledit dirigeant, André Auguste, dit, "l'Auguste Auguste", lui promet de lui rendre son fils si Jan travaille pour lui. Il va donc devoir travailler pour ce charmant monsieur et emmènera le lecteur dans un monde détruit, reconstruit, et peuplé de gens bien... et de sacrés cons aussi! C'est une histoire d'aventures, d'aventure aussi, où j'ai voulu briser quelques codes.
4 - Tu as actuellement en chantier un roman de fantasy dans l'univers de la piraterie ( dont on peut lire le premier chapitre sur ton blog). Est-ce que tu peux nous présenter ce projet ?
Ce projet, pour le moment sans titre (oui, non... "romanpirates.doc" ça compte pas) est une sorte de... Euh... Melting pot de genres. Si ça se présente à première vue sous un genre de roman de pirates classique (avec des bateaux, du jargon qui donne le mal de mer et de l'alcool), j'y ai ajouté une dimension féérique. En effet, les humains cohabitent avec des êtres élémentaires, les Faes. Il y a les Pyros (feu), les Aquariens (eau), les Isha (terre), les Eols (air) et les Séléniens (lune). Nous allons suivre Mahalia, une humaine qui tente visiblement de fuir quelque chose ou quelqu'un à bord du Fantôme, vaisseau à la renommée sombre, et hommage non dissimulé à mon livre de chevet "Le Loup des Mers" de Jack London. Comme dans les Promesses d'Atro-City, il y aura pas mal de voyages, mais un peu plus de magie.
5 - Quels sont tes autre projets littéraires ?
Ho pas grand chose... J'ai quelques trucs qui trainent dans mes tiroirs:
-Une trilogie fantastique/aventures qui défonce un peu tous les codes du genre aussi.
-Un roman fantastique/horreur (je cherche quelqu'un pour les corrections afin de l'envoyer à des éditeurs d'ailleurs...) qui se passe dans un monde contemporain, inspiré du jeu de rôle Kult.
-J'ai aussi un recueil de nouvelles horreur/zombie qui cherche un éditeur pour l'adopter.
-Et aussi un roman Heroic Fantasy a retaper (le premier truc que j'ai écris... Mais cette fois, en version travaillée et avec un peu plus d'XPs dans ma compétence "racontage d'histoires").
-Bon pis des nouvelles à droite à gauche...
-Et un projet (bon du coup c'est moins littéraire) de murder (sorte de mini jeu de rôle grandeur nature) que j'écris en collaboration avec mon compagnon.
-AH OUI! Et j'ai aussi une BD débile (loin de la glauquerie de mes textes) tout en bonhommes bâtons où je raconte (à peu près... Hem) ma vie ultra captivante. A ma grande surprise, les gens aiment bien. Je l'ai, avec une imagination incroyable, appelée "BD bâtons" et on peut suivre ça sur la page facebook appelée, devinez comment, lecteurs, lecteuses... "BD bâtons"... Heeee oui!! Et... -Ah non, pas de nouveau tiret, c'est tout!

lundi 24 novembre 2014

La SF est elle un produit de luxe ?

L'anthologie numérique Rêver 2074 vient de sortir à l'initiative du Comité Colbert. Rassemblant quelques auteurs de SF autour de l'avenir des industries du luxe en 2074 justement, cette anthologie pose malheureusement problème. Je vais d'hors et déjà évacuer les arguments idéologiques. La SF n'est la propriété d'aucun parti ou faction. Elle a le droit de dire ce qu'elle veut. Ce n'est pas là que la problème réside. C'est plutôt l'image que le genre va refléter.
Le public populaire a déserté un genre devenu trop pessimiste à son goût. Là on se rapproche des élites. Ne risque - t - on pas de faire fuir encore plus ce public qui s'en est allé ? Ne risque - t - on pas de forger l'étiquette SF = littérature élitiste. Tout le contraire de ce qu'il faut faire.

Mais d'un autre coté je comprends les auteurs. Pour une fois des gens s'intéressent à la SF. J'aurais préféré que ce soit des startups ou l'agence spatiale européennes. Mais bon le Comité Colbert qui fait là une bonne opération, est un réseau taillé pour la société de l'information. Il permettent au milieu du luxe de redorer son blason après un certain nombre d'opération de mécénat calamiteuse autour de l'art contemporain, malheureusement en instrumentalisant un peu les auteurs de SF. C'est un peu dommage. Mais l'enthousiasme se comprend. Le fait qu'une version anglaise existe et que les auteurs vont être reçu à New York devant une partie du gratin de la SF américaine, ça ne peut pas se refuser quelque part. Et en plus une opération de pure communication fait plus pour la SF française que les gesticulations de certains éditeurs qui se disent pourtant actifs dans le domaine de la promotion de leurs auteurs.

samedi 22 novembre 2014

L'arbre et la forêt

Je regardais il n'y a pas si longtemps une vidéo où Didier Guiserix évoquait les début du jeu de rôles en France. Il expliquait que le fait que Donjons et Dragons avait eu des problèmes de distribution et d'édition avait profité à la création française.
On peut à mon avis avoir le même raisonnement en ce qui concerne la fantasy française. Dans les années 90 les tentatives pour publier Brooks et Goodkind sont des échecs. Cela a largement profité à la création française. C'est grâce à cela que nous avons eu Pierre Grimbert ou Alexandre Malagoli et même peut être Mathieu Gaborit, Nicolas Cluzeau, Nicolas Jarry et même le cycle de la Moïra d'Henri Loevenbruck. Du coté des traductions on a pu avoir David Gemmell ou  Louise Cooper. De son coté Rivage Fantasy prend des risques en faisant traduire les Feys de Kristine Katherine Rush.
A partir de 2003, Bragelonne traduit Brook et Goodkind donnant bien involontairement un coup d'arrêt à la création française. Les auteurs français ne pouvant pas rivaliser avec ces énormes vendeurs. Les éditeurs ne prennent plus de risques sur les nouveaux auteurs français sachant très bien qu'ils ne réussirons pas à égaler les ventes des anglo-saxons, même sur de la BCF. Et les traductions sont un peu moroses dans les premiers temps. Beaucoup d'auteurs ne parviendront pas à convaincre le public face aux blockbusters du genre. Si Brooks et Goodkind n'avaient pas été traduits à cette époque nous aurions eu plus d'auteurs français, "L'année de notre guerre" de Steph Swainson n'aurait pas trop mal marché et les suite auraient été traduites. Erickson aurait sans doute été traduit lui aussi et aurait marché correctement. Bref les choses auraient été différentes.

jeudi 20 novembre 2014

L'imaginaire et les gamers

Plusieurs initiatives tentent de mettre en dialogue le milieu des littératures de l'imaginaire et celui des gamers et méritent donc d'être saluées ici.
- Le webzine Glitch Out, dont nous avons parlé se veut un pont entre la culture des gamers et celle des littératures de l'imaginaire.
- Les éditions Elenya viennent de sortir une anthologie autour du jeu indépendant en ligne, Royaumes Renaissants.
- Enfin le fanzine Etherval aura un stand lors du Toulouse Games Show.
C'est un bon début, il faut continuer le combat.

Dans le monde anglo saxons les choses se font diffèrement. Les éditeurs sont en train de publier des romans qui peuvent séduire ce public. Le fait que depuis un an ou deux, l'on commence à sortir beaucoup de romans Arcanepunk va dans ce sens. Aux USA on a même des concepteurs de jeux vidéo qui passent au roman comme Alan Campbell par exemple. Ce n'est pas encore le cas en France.

mardi 18 novembre 2014

Les espoirs de l'imaginaire : Romuald Herbreteau

1 - Peux tu te présenter en quelques mots ?
Je m'appelle Romuald Herbreteau, 38 ans, et j'habite avec ma famille au bord de la Loire en campagne angevine. Je travaille dans le monde de l'informatique. Bref, je suis bien camouflé et mes voisins n'ont pas la moindre idée de mon autre vie (écrivain de SF passionné).

2 - Comment es tu venu à l’écriture ?
Très tôt, à l'âge de 7 ans, avec l'écriture d'un scénario catastrophe, recopié à la machine par mon père et relié à la laine épaisse par ma mère (véridique). Je me souviens parfaitement de l'histoire : des scientifiques à la recherche du pourquoi de cette incroyable invasion de dinosaures au beau milieu des années 80.
En 1983 (j'avais toujours 7 ans), j'ai tanné mes parents jusqu'à ce qu'ils m'emmènent au cinéma voir le Retour du Jedï. Je n'en suis jamais revenu. Au plus loin que me ramènent mes souvenirs, j'ai toujours été fasciné par l'espace, les vaisseaux spatiaux, les extra-terrestres.
J'ai passé mon adolescence à lire tout ce qui me tombait sous la main pourvu que ce soit de la SF et, comme beaucoup, j'ai eu ensuite envie d'écrire ce que je ne trouvais pas chez les auteurs (particulièrement américains) que je dévorais. À 18 ans, j’attaquais mon premier roman puis... plus rien jusqu'à l'âge de 30 ans. J'ai eu une sorte de deuxième naissance à l'écriture à ce moment, une première publi à 34 ans.
En fait, je suis un très jeune auteur !

3 - Dans une Saison Mauve, l’univers présenté dans la nouvelle est proche de ce que faisait Serge Brussolo. Est ce un auteur qui t’a influencé ?
C'est marrant, parce que c'est quelque chose que tu avais écris à l'époque à propos de cette nouvelle et je dois avouer que j'ai été d'accord avec cette comparaison bien que ce fût complètement inconscient au moment de sa rédaction.
J'ai eu une période très intense de lecteur dans les années 90 où je ne jurais que par Serge Brussolo et Pierre Pelot. Le premier pour ses images ultra-puissantes, le deuxième pour sa désespérance, les deux pour leur cruauté. À 16 ans, j'ai lu d'une traite Rinocérox. Ce roman me hante encore. Je pense à Mange-Mondel'homme aux yeux de napalmla petite fille et le dobermanCrache-Béton... Il faut lire la nouvelle Soleil de Soufre pour saisir la puissance de ses images. À couper le souffle ! J'associe aussi Brussolo aux couverture de Jean-Yves Kervevan et ses illustration très... organiques. J'ai eu le plaisir de le rencontrer récemment (il n'habite pas très loin de chez moi). Ses œuvres sont hypnotiques. Il crée des sculptures qu'il photographie par la suite. Elles collent tellement bien avec l'univers de Serge Brussolo !

4 - Tu as collaboré à un fascicule du Carnoplaste.
a- Qu’est ce qui t’intéressait en écrivant un fascicule de merveilleux scientifique à la manière du début du 20 éme siècle ?
Robert Darvel, l'éditeur du Le Carnoplaste (Le Carno pour les intimes), m'a proposé de participer à l'histoire du système solaire dans les années 20. Je connaissais un peu son travail d'éditeur de fascicules pour avoir lu Green Tiburon de Julien Heylbroeck sans être un initié de la littérature populaire. Par exemple, Harry Dickson n'évoquait rien pour moi et je ne voyais que très vaguement qui était Jean Ray. Je n'étais donc pas le cœur de cible.
N'empêche, je suis curieux par nature. Me proposer d'écrire une histoire surannée dans un style un peu ampoulé à contre-courant de ce que j'étais capable de rendre s'est révélé un défi succulent, d'autant plus qu'accompagné par Robert Darvel, un homme aussi passionné et connaisseur qu'exigeant.

b- Le fait de s’inspirer d’une illustration et d’un titre déjà existant est il une contrainte difficile ? Es tu prêt à recommencer l’exercice ?
Robert m'a demandé si j'étais intéressé d'écrire en m'inspirant d'une illustration de Philippe Caza. La bonne blague ! J'étais (et parfois je suis encore) de ces gens qui choisissent le livre en fonction de la couverture. J'ai lu des tonnes de romans uniquement parce qu'ils étaient illustrés par Caza et Manchu !
Quand j'ai reçu la couverture de Vénéneuse Vénus, tout de suite m'est venue en tête l'illustration du maître Caza pour le jeu vidéo d'aventure Kult de 1989 (et qui, cela dit, était un bon jeu). Le lien de parenté entre ces deux illustrations m'a frappé. Je me suis souvenu du jeune garçon que j'étais à l'époque : aurait-il imaginé que 25 ans plus tard il travaillerait sur le même projet qu'une de ses idoles ?
Aujourd'hui, on peut trouver deux exemplaire de Vénéneuse Vénus chez LE bouquiniste SF de New-York, Singularity & Co. C'est une vraie fierté.

c- Plus généralement écrire de la SF pulp est il quelque chose que tu voudrais développer dans l’avenir.
Si un projet de cet ordre m'est proposé, je signe des deux mains. J'adore le côté tout est possible, où aucune règle n'est à suivre sinon embarquer le lecteur avec toute la puissance et l'inventivité qu'une telle liberté permet. Mais je tends naturellement vers des récit plus mainstream, je n'oserais pas dire plus réalistes, et je crois avoir envie de dire des choses aussi sous cette forme.

5 - Quels sont tes autres projets littéraires ?
J'ai attaqué un roman SF dont le sujet tourne autour du temps sans pour autant revisiter tous les concepts qui y sont relatifs et déjà très bien traités par d'autres auteurs depuis la nuit des temps de la SF. Mon approche est plus intimiste. Il y aura des étoiles, des vaisseaux spatiaux et des extra-terrestres. On ne se refait pas.
Plus proche, deux nouvelles devraient être publiées en 2015 dont une qui est clairement un hommage à Pierre Bordage.

samedi 15 novembre 2014

Génération sacrifiée

Lorsque l'on parle de la génération sacrifiée on pense à cette génération d'auteurs confrontés à la raréfaction des supports de publication dans les années 80. Mais il me semble qu'il existe une autre génération sacrifiée celle des années 2000. En effet de nombreux auteurs talentueux présents au sommaire des fanzines, revues et anthologies ont brusquement disparu. Certains, pourtant évoquaient leurs projets de romans sur des listes de diffusion à l'époque. En effet se souvient - on encore de Patrick Duclos, Lionel Belmon, Cyril Gazengel, Philippe Heurtel, Bernard Majour, Martine Loncan, Léonore Lara, Ronan Quarrez.... Je suppose que j'aurais pu en citer beaucoup d'autres. D'autant que quelques romanciers sympathiques ont disparu également dans les limbes, je pense entre autre à Colin Marchika. Trop d'auteurs, pas assez de lecteurs, toujours la même chanson.
Curieusement par un hasard étrange des auteurs de la génération sacrifiée des 80 ont fait leur retours. Je pense entre autre à Sylvie Lainé mais également à Patrick Raveau, Adam Possamai, Raymond Milesi. On a vu aussi une publication posthume d'une oeuvre de Jacques Boireau. On peut être endroit d'espérer avoir un jour des romans de fantasy de Jean Luc Triolo ou d'Elisabeth Campos. Bref tout cela est très curieux. 

Il faudra bien un jour fidéliser un lectorat en se basant sur un effet de communauté au lieu de céder aux sirènes du marketing facile. Faire lire de l'imaginaire à  des lecteurs de blanche ou alors se tourner vers la ménagère de moins de cinquante ans pour être présent en supermarché sont autant de fausses solutions. On a besoin d'une masse critique d'auteurs français pour que l'imaginaire soit présent dans les salons du livre et notamment les salons du livre de province. Pour essaimer un peu partout. Et pour cet objectif il faut publier plus de français. Garder la traduction pour les oeuvres majeure et publier aussi bien des oeuvres exigeantes que des oeuvres populaires pour les auteurs français. 

samedi 8 novembre 2014

La fantasy est elle rentable?

Cet article répond à un autre que l'on trouve sur le site de l'association Apocryphos. La thèse qu'il y ai développé est que les éditeurs ont privilégié la fantasy parce que celle ci est plus rentable que la SF.
Je ne suis pas tout à à fait d'accord avec cette thèse. Je pense au contraire que si la fantasy est plus développée que la SF c'est qu'elle a su garder un versant populaire intéressant tandis que la SF s'est progressivement coupée du public populaire ou en tout cas a sérieusement restreint son offre populaire.
Remontons dans les années 80 aux USA. Les éditeurs de livres de poche connaissent un crise importante liée aux changements d'habitudes de consommation des lecteurs américains. Les chaînes poussent à toujours plus de rentabilité et la victime ce sera le livre de poche. Les éditeurs de poche migrent vers le grand format. A l'époque ce sera fatal à une partie de la fantasy populaire américaine. La sword and sorcery alors dominante en nombre de titre disparaît progressivement des programmes de chez DAW ou Del Rey. Mais à coté de ça se développe une littérature dérivée de Donjons et Dragons qui prend le relai. La licence se développe étouffant tout velléité de reprise de la sword and sorcery originale par les grands éditeurs US. La sword and sorcery en fait va se développer en Grande  Bretagne grâce à David Gemmell. La fantasy continue a exister mais l'on va privilégier les grandes sagas qui reprennent le schéma de Tolkien. Ce qui va appauvrir énormément le genre. Il faudra attendre le milieu des années 90 et l'affaiblissement de la licence Donjons et Dragons pour que la fantasy se remette à se diversifier.
La SF a connu la même évolution au début des années 2000. Les licences Star Wars et Star Trek vont peut à peu envahir l'espace dévolu au space opera populaire rejointes bientôt par Warhammer 40K, Halo, Mass Effect, Starcraft et d'autres ouvrage issus de jeux vidéo. Cet invasion de l'espace de la SF populaire par des licences pour certaines prolifiques a progressivement appauvri l'offre populaire. Or SF populaire et SF exigeante sont les deux faces d'une même pièce. Donc en ayant une masse critique de récits populaires trop faible et trop peu diversifiée le genre ne pouvait que péricliter. A coté de cela la place des licences a diminué dans la fantasy. On y trouve plus guère que Donjons et Dragons avec une offre diminuée par rapport aux années 90 (seul les Royaumes Oubliés continue à exister) et Warhammer Battle. La licence Warcraft a aussi eu une existence éphémère dans les années 2000. Mais dans l'ensemble, moins de licences veut dire plus de place pour des récits populaires originaux. Depuis le milieu des années 2000 la sword and sorcery a même pointé le bout de son nez avec des auteurs comme James Enge, Michael Ehart ou Howard Andrew Jones. Donc la meilleure santé de la fantasy dans les 2000 vient uniquement de l'affaiblissement des licences tandis qu'en SF elles occupaient une place plus importante. Donc si la SF s'est affaiblie c'est parce qu'elle a voulu privilégier  la carte de la rentabilité immédiate et que ce faisant elle s'est tirée une balle dans le pied.

mercredi 5 novembre 2014

Sous la ligne de flottaison

Il est clair que le milieu de l'imaginaire en France n'est pas du tout serein. Les querelles de chapelles y sont aussi nombreuses qu'ésotériques et cela nuit au développement des genres de l'imaginaire dans notre beau pays. D'autant plus que les choses sont plus compliquées qu'une querelle d'anciens et de modernes. Il y a ceux qui défendent une science fiction pure contre la pollution de la fantasy et du fantastique. Ceux qui considèrent que la SF doit être une littérature d'idées et ne pas être une littérature de divertissement et pour qui il n'y a pas de place pour la littérature populaire dans nos genres favoris (après tout le roman noir est passé de roman policier à roman d'intervention sociale avant de devenir un phénomène culturel. Mais bon l'histoire ne se répète pas heureusement). Il y a évidemment ceux pour qui c'était mieux avant. Ceux qui font une surenchère dans le boboisme....

Bref il y a le noyau dur du fandom avec ses saints et ses pécheurs, ses sages et ses fous. Et il y a le fandom bis qui lui reste au dessous de la ligne de flottaison de l'iceberg. Les webzines Outremonde, Mots et Légendes ou ceux de l'association Ymaginères qui publient les auteurs de demain. Les éditeurs comme Voy'el, Rivière Blanche, Ad Astra ou Argemmios... qui vont au charbon pour publier de jeunes  auteurs français méritant une vraie publication professionnelle. Une jeune génération d'auteurs qui essaie de faire une place au soleil et dont certains soit disant professionnels ne veulent pas entendre parler. Qui sait parmi vous que le maître de l’horreur francophone s’appelle Grégory Covin ? Qui sait que les meilleurs nouvellistes belges du moment sont David Osmay et Hans Delerue ? Qui parmi vous connaît Kevin Kiffer, David Chauvin ou Philippe Deniel ( et j’aurais pu en citer une dizaine d’autres voire plus) ?Autant d’auteurs qui méritent mieux que des pages dans des publications amateures. Il est dommage que certains aient voulu abuser de leur confiance et nous ait fait perdre un temps précieux dans la quête de la masse critique nécessaire. Mais cela est une autre histoire. Moi j’aime ce fandom bis avec son enthousiasme, sa fougue, ses auteurs et ses fan - éditeurs qui osent et qui le font avec le sourire. Curieusement les querelles du fandom officiel ne semble pas avoir court sous la ligne de flottaison. Pourvu que ça dure. Bref j’ai toujours soutenu les webzines dans ces colonnes et ça continuera. 


Je suis content d’ailleurs que des auteurs qui ont commencé dans ce fandom bis comme Timothée Rey ou Anthony Boulanger soit aujourd’hui aux portes du succès. Je suis content que des auteurs pros comme Jean Claude Dunyach accepte d’entamer le dialogue avec les auteurs semi- professionnels ou amateurs qui sévissent dans ces pages oubliées. Bref finalement un partie du fandom a compris que cette génération ( qui finalement n’en est pas une car  d’âge plutôt varié) peut apporter une fraîcheur et un souffle nouveau aux genres que nous aimons. Ce n’est pas si loin que ça de la nouvelle génération anglo-saxonne. Et pout une fois que nous pouvons être coordonné avec l’autre côté de l’Atlantique et de la Manche plutôt que de tirer dans une autre direction parfaitement inattendue et qui généralement a plutôt tendance a désarçonner une grande partie du lecteur lambda. Profitons en et continuons le combat.

mardi 4 novembre 2014

Les espoirs de l'imaginaire : Catherine Loiseau

1 - Peux tu te présenter en quelques mots ?

Je me nomme Catherine Loiseau, et pour me présenter en quelques mots, disons que j’habite dans le grand nord de la France (au milieu des banquises et des ours polaires) et que j’approche dangereusement de la trentaine. Je partage mon temps entre inventer des mondes fantastiques, coudre des vêtements qui n’auraient pas dépareillé en 1890, et le noble art de taper sur mes semblables à coup d’épée.


2 - Comment es tu arrivée à l'écriture ?

J’ai commencé à écrire à 17 ans, principalement parce que je m’ennuyais en cours. J’avais aussi envie d’inventer de nouveaux univers, de faire exister les personnages qui me trottaient dans la tête. Au début, il s’agissait simplement de petites histoires griffonnées dans mes cahiers, mais petit à petit, ce passe-temps a pris de l’ampleur, à tel point que je ne conçois plus ma vie sans l’écriture.


3 - Peux tu nous parler de ton projet de fantasy, la cité des brumes ?

"Nul ne sait ce qu'il y a autour de la Cité, car nul ne s'est aventuré au-delà des brumes. Qu'importe, la Cité se suffit à elle-même et on y vit tant bien que mal. Louve, la Changebête, appartient à une race traquée depuis des siècles, car les siens sont responsables d'un grand mal, la Catastrophe. Pour réparer ce mal, son maître l'envoie voler aux Gémeaux une résine précieuse. Mais tout ne se passe pas comme prévu, un Gémeau est retrouvé mort, et on l'accuse du meurtre. Elle ne doit son salut qu'à Aliska, son amante vampire et Rêvelune, une Modeleuse, qui l'abrite chez les siens. Mais un deuxième meurtre est commis, et Rêvelune, Louve et Aliska doivent prendre la fuite. Rejointes par Ioryl Lyroi, le Gémeau et Gerlith, un jeune humain, elles devront lutter pour rester en vie et pour trouver qui est derrière ces meurtres, tandis que les haines trop longtemps tues vont éclater au grand jour et que la Cité entière sombre lentement dans la guerre civile"


Il s’agit d’un roman que j’avais en projet depuis des années, que j’ai écrit en 2011, et qui est actuellement à l’étude chez les éditeurs (j’espère avoir plus d’informations à ce sujet d’ici peu).

C’est un roman plutôt sombre, avec des personnages complexes, un univers riche, beaucoup d’intrigues politiques et de batailles de rue. J’espère vraiment que ce roman trouvera un jour son public.


4 - Peux tu nous dire ce qui se cache derrière ton autre projet, Ceux du mercure ?

Ceux du mercure est le premier roman d’une trilogie steampunk.

L’histoire :
La petite île de Kerys est relativement épargnée par les failles et les Abominations qui ravagent le reste du monde. Mais relativement épargnée ne veut pas dire totalement en sécurité. Mais les Kerysiens peuvent compter sur les Brigades du Mercure. Le capitaine Honoré Rocheclaire, la doctoresse Artemise Bouquet, le professeur Maximilien Rocheclaire, l'androïde Ripley et tous les autres membres des brigades veillent sur eux et n'hésiteront pas à user du lance-flamme ou des grenades au phosphore si besoin. Le tout avec style et grande classe, cela va sans dire. Cannes épées et robes à tournure, androïdes et zeppelins, belles dames et messieurs élégants, Abominations à la Lovecraft et armes lourdes sont au programme.

Contrairement à la Cité des brumes, il s’agit d’un roman plutôt léger, qui alterne action, romance et humour. Le manuscrit est à l’étude chez les éditeurs, on croise donc très fort les doigts pour la suite. En tout cas, le projet suit son chemin, car j’ai fini en septembre le premier jet du tome 2 : Ceux du dehors.



5 - Tu viens de publier chez L'Ivre Books une nouvelle mettant en scène la ligue des ténèbres. Peux tu nous parler plus avant du cycle de récits qui mettent en scène ces personnages ?

"La Ligue des ténèbres voit le jour dans le Londres des années 1880. Elle est composée de quatre membres : Thomas Wiseman, escroc à la petite semaine, Ginger Astley, arnaqueuse, Edmund Nutter, savant fou, et Samantha Wiseman, narratrice et caution « santé mentale » du groupe. Ayant par erreur fabriqué une machine à voyager entre les mondes, la Ligue a un but bien précis : conquérir le monde. N’importe lequel, en fait."

La Ligue des ténèbres est un feuilleton que je suis en train d’écrire (Il s’agit de mon projet Nanowrimo du mois de novembre, pour tout dire). Il devrait compter au total environ vingt-cinq épisodes, qui seront publiés sous format numérique à partir du printemps 2015, et sera illustré par Sylvie Sabater.

La tonalité de cette série est franchement humoristique, pour moi, il s’agit avant tout de m’amuser avec ces personnages un peu bras cassés qui tentent de conquérir le monde. C’est aussi une bonne occasion de rendre hommage à toutes les facettes de la littérature de l’imaginaire, à travers les différents mondes que la Ligue visitera.

Ceux intéressés par le projet peuvent suivre mon actualité sur mon site : catherine-loiseau.fr



6 - Quels sont tes autres projets littéraires ?

Je travaille également sur un roman de fantasy jeunesse.

L’histoire en quelques mots :
Ikimi et Ermelia sont toutes les deux étudiantes à l’Académie d’Arki, fleuron de l’empire méalien. Ikimi se destine à la Cohorte, prestigieux corps de soldats d’élite, tandis que les capacités d’Ermelia annoncent qu’elle deviendra une grande magicienne. Leur futur est tracé.
Mais quand on attente à la vie d’Ermelia, tout bascule. Que veulent vraiment les Méaliens ? Qui est cet homme qui cherche à tuer Ermelia à tout prix ? Pourquoi semble-t-elle posséder une connexion avec Méala, la déesse endormie ? Quels secrets cache la famille d’Ikimi ?
Sans le savoir, Ikimi et Ermelia ont mis le nez dans un terrible engrenage et devront se montrer à la fois fortes et malignes si elles veulent survivre.

Le roman est en phase de correction, avant une ultime relecture et un envoi aux éditeurs.

Outre les romans, j’écris aussi des nouvelles (publiées notamment chez l’Ivre book, Etherval et Lune Écarlate). Je travaille également sur des articles qui allient ma passion de l’écriture à celle du maniement de l’épée. Cette série, intitulée « escrime pour les écrivains », visera à donner aux auteurs les informations nécessaires sur les différentes armes et les styles d’escrime. Le lancement devrait se faire en janvier 2015. 



lundi 3 novembre 2014

Désindustrialisons la littérature populaire

Aujourd'hui le coeur de la littérature populaire est composée par des licences commerciales là où naguère elle était portée par des romans originaux. La plupart des franchises sont construites autour de licences fermées. Non seulement je pense qu'il serait bon de revenir à une littérature d'exploitation originale mais il serait aussi bon à réfléchir à des univers partagés en open source.

Je comprend l'intérêt des romans dérivées issus des jeux de rôles et des jeux de stratégies car ils permettent d'approfondir les univers et d'améliorer l'immersion des joueurs, ceux issus des oeuvres médiatiques ou même des jeux vidéos se justifient moins. Mais la création d'univers partagés originaux, jeux littéraires d'un groupe d'auteurs est lui une expérience qui peut s'avérer intéressante. C'est vrai que les éditeurs pensent peu à utiliser des contrats reposants sur des licences ouvertes. Un univers comme Hoshikaze est partiellement ouvert, les auteurs n'étant soumis qu'au droit d'auteurs concernant leurs textes. C'est ainsi que Philippe Halvick a pu publier un roman se déroulant dans cet univers chez Rivière Blanche. Le problème c'est que l'éditeur des licences, en France, c'est Bragelonne. Bref c'est encore une fois un petit éditeur qui va au charbon.

Pourtant le développement de licence en open source qui peuvent être publiées par des éditeurs multiples est un progrès par rapport au système actuel des licences fermées et va dans le sens de littératures populaires moins industrialisées ne reposant plus sur des produits formatés et prémachés par les média. Je reconnais que c'est plus difficile à mettre en place mais la lutte contre la standardisation des littératures populaires qui fait que les littératures populaires nationales n'existent plus au profit d'une littérature mondialisée pilotée depuis Hollywood, est plus que jamais d'actualité. Les licences s'essoufflent. Profitons en.

samedi 1 novembre 2014

Imaginaire made in Limousin

J'habite cette belle région qui est le Limousin. La culture de l'imaginaire n'y est pas absente. On y trouve même des spécialistes pointus. : Etienne Barilier, spécialiste français du steampunk, Laurent Bourdier, biographe français de Stephen King, Jean Depelley, biographe de Jack Kirby et rédacteur en chef de Métaluna entre autre, Iréne Lenglet, spécialiste universitaire de la SF qui dirige aujourd'hui le centre de recherche en littérature populaire de l'université de Limoges sans oublier les frères Louinet, Patrice spécialiste de Robert Howard et Hervé spécialiste de Jean Ray. Oui il y a des spécialistes mais par contre au niveau des auteurs publiés c'est un peu le désert : à part Gil Prou et le nouvelliste Kevin Kiffer, je n'ai pas connaissance d'autres auteurs sévissant dans la région même si l'on élargit aux auteurs amateurs. Peut être qu'au niveau des auto-édités il y a des gens intéressants. Ce sont généralement eux qui passent hors de porté des radars.

Bref si vous êtes auteurs de SF, de fantasy ou de fantastique et que vous résidez en Limousin postez un petit commentaire à cet article. Je suis persuadé qu'il y a dans cette région une dynamique souterraine. Les temps sont murs pour la faire émerger en pleine lumière.

dimanche 26 octobre 2014

Du coté des webzines

Nouveau Monde Hors série 1
Nouveau Monde est un webzine qui s'améliore de numéro en numéro. Et ce numéro spécial qui réunit les participants de l'avant dernière édition du tournoi des nouvellistes possède indéniablement de petites perles. On retiendra notamment les noms d'Alizé Villemin, de Loïc Mauran, d'Olivier Jarrige, de Hugo Dorgère et évidemment d'Eric Colson qui a déjà tout d'un grand nouvelliste et dont on attend avec impatience des publications professionnelles. J'ai été moins touché par les textes de fantastique / horreur mais c'est plutôt une question de goût ( d'autant plus que ce sont des nouvelles à chute ce que je n'apprécie pas plus que ça). Mais dans ce registre Françoise Grenier Droesch s'en sort vraiment bien avec un histoire à faire dresser les cheveux sur la tête ( et qui n'aurait pas dépareillé dans la Quatrième Dimension). On retrouve comme toujours, chez Nouveau Monde, un parfum de littérature populaire loin d'être déplaisant.

Glitch Out 1
Ce nouveau venu dans l'univers des webzine a relevé un défi qui ne me laisse pas indifférent. Les lecteurs de ce blog savent combien je tiens au dialogue entre les média. Et Glitch Out a décidé de créer un pont entre les littératures de l'imaginaire et l'univers du jeu vidéo. Ce numéro, dont la thématique est La fille et le robot comprend quelques nouvelles de SF dont les meilleures sont manifestement celles de Tom Ariaudo et de Patrick Ferrer. Je suis moins fan des autres qui m'ont paru plus classique dans leur traitement ( même si le texte de hard scient de Sham Madessi est très bon malgré une thématique relativement vue et revue). Le webzine se termine avec un dossier sur un jeu vidéo indépendant, The girl and the robot. Bref une initiative comme on aimerait en voir plus souvent.

lundi 20 octobre 2014

Les espoirs de l'imaginaire : Lousia Casal

Peux-tu te présenter en quelques mots ?

J’écris des nouvelles et des romans dans le genre de l’imaginaire avec une préférence pour la science-fiction. Louisia Casal est mon pseudonyme d’écrivain amateur.
Dans la vie réelle, je suis informaticienne et j’essaie de concilier le travail et l’écriture autant que possible. Je cours après le temps comme je cours après le train...

Comment es-tu arrivée à l’écriture ?

J’ai toujours eu beaucoup d’imagination, mais je n’ai pas eu le réflexe d’écrire tout de suite, par manque de confiance principalement. Lorsque j’étais étudiante, je me suis amusée à écrire un roman de science-fiction, puis j’ai commencé à écrire des nouvelles, de une à cinq pages. J’ai adoré ces expériences et j’ai continué. J’ai eu la chance de publier une nouvelle, intitulée L’âtre aimé, en 2010 dans le fanzine Katapulpe. J’ai été très surprise, car j’avais un regard très critique sur mes textes et c’était la première fois que j’en soumettais un. Cette expérience réussie a été décisive, car depuis je ne me suis plus arrêtée d’écrire. En 2012, j’ai publié une deuxième nouvelle, intitulée La ville nébuleuse, dans le webzine Univers 12 d’Outremonde. Je dirai donc que ce sont les nouvelles qui m’ont introduite dans le monde de l’écriture.

Peux-tu évoquer ton projet de science-fiction pour jeunes adultes « L’ascenseur voyageur » ?

Il s’agit de mon premier roman. J’ai écrit le premier jet lors du nanowrimo de novembre 2012 et depuis je le relis inlassablement pour le corriger et l’améliorer. En 2013, j’ai écrit le deuxième tome, toujours au cours d’un nano. L’ascenseur voyageur, c’est l’histoire d’un garçon, appelé Axel, envoyé dans un monde appelé Ascor par l’ascenseur de son immeuble. Il y rencontre Lancelot, un gamin de dix ans, et Olympe, une fille étonnante, qui vont l’aider à trouver le moyen de redescendre à son étage. Et cela ne va pas être facile, surtout si personne ne connait le mode d’emploi de l’ascenseur voyageur...
Le premier tome est actuellement sous le regard attentif des bétalecteurs.

Quels sont tes autres projets littéraires ?

J’ai plusieurs projets en cours, principalement des romans. J’ai mis de côté les nouvelles pour essayer un format plus long. Je suis à la fin d’un roman en épisode, Tyr l’immortelle, qui raconte l’histoire de Lynn, une femme obligée de suivre l’âme de son ami, emporté dans un monde où des Immortels règnent d’une main de fer. C’est un mélange de fantasy et de fantastique.
J’ai mis en pause un roman intitulé Les Cités de Cristal où l’héroïne est abandonnée, mourante, sur une planète aux villes faites d’émeraude et de saphir. C’est un planet opera. Je pense le reprendre l’année prochaine.
Pour le nano de novembre, je travaille sur une novella de science-fiction avec une touche de steampunk. J’en suis encore à l’élaboration du plan.

Quels sont tes autres activités dans le monde littéraire ?

Je tiens un blog, Les Actus Fictives (www.lesactus.fictives.fr), où je donne mon avis sur les livres, les films et les séries qui touchent le monde de l’imaginaire. J’ai aussi posté plusieurs extraits de mes écrits.
J’ai créé aussi, il y a quelques années, avec un autre passionné d’écriture, le site Épopées Fictives (http://www.epopees.fictives.fr/). Ce site a pour but de recenser les appels à textes d’associations et de maisons d’édition de l’imaginaire qui recherchent des nouvelles. Un autre membre s’est ajouté à notre équipe pour créer l’application android du site. Nous espérons offrir une meilleure visibilité des ATs.


dimanche 12 octobre 2014

L'envers de l'auto édition

Encore une réaction à l'article de Thomas Munier.
En 2008 j'ai édité un recueil de nouvelles via The Book Editions. J'en ai assuré la promotion via un certain nombre de forums ainsi que par mon blog et quelques envois de mails ciblés. J'ai aussi distribué quelques exemplaires en service de presse lors de mon passage aux Utopiales. Bref j'ai vendu très peu d'exemplaires via les commandes en ligne. J'ai voulu continuer l'effort. Je me suis tourné vers les salons du livre ayant lieu dans ma région en commençant par les petits. Je me suis heurté à la dure réalité. Quand on écrit de la science fiction en Limousin on ne vous veut pas dans ce type de manifestation ( déjà que les auteurs de polar ont du mal à faire leur trou... et ne commencent tout juste à être reconnus. Mais c'est une autre histoire). Les services de presse mentionnés précédemment n'ont bien sûr donné lieu à aucune chroniques. J'ai découvert que l'auto édition c'est bien à condition de faire un énorme effort de communication. J'ai fini par abandonner le combat (je me rend compte que j'aurais pu évoquer ces faits dans l'année de l'échec).

S'auto-éditer cela veut dire être parti sur les routes tous les week ends et aller dans des salons un peu partout en France. En tout cas là où l'on vous veux bien (quand on est un auteur de l'imaginaire ce n'est pas le cas partout). Si l'on basculait dans le tout auto-édition comme le suggère Thomas, le problème se poserait pour tous les auteurs. Le système, même parti sur des bases radicalement différentes, ne changerait pas en profondeur. La philosophie se voudrait plus généreuse mais quelque part les auteurs ne seraient pas forcément plus gagnants qu'à l'heure actuelle. En Effet ceux qui aurait le plus d'argent ou le meilleur réseau auraient les moyens de se faire connaître mieux que les autres. Ce ne serait pas forcément les meilleurs auteurs qui seraient les plus reconnus.
Les auteurs seraient obligés en effet de prendre en charge tous les efforts de communication qui sont aujourd'hui l'apanage des éditeurs. Et ça peut revenir cher de se faire connaître.
Sur la difficulté pour les auteurs auto-édité ainsi que ceux qui sont publiés par de petits éditeurs je renvoie aux article du blog de Yves Daniel Crouzet : http://yvesdanielcrouzet.blogspot.fr

Bref l'analogie avec la permaculture a ses limites ( le paysan vend dans son territoire, la culture n'a pas forcément de frontière géographique). D'autant plus que les lecteurs ont des goûts différents et tout le monde n'a pas la même approche de la lecture ( tandis que tout le monde est obligé d'acheter des produits agricoles pour subsister). Elle vaut toutefois en ce qui concerne la créativité et les pratiques de l'auteur ainsi que sa manière d'écrire. Il vaudrait mieux que l'édition parte sur un nouveau modèle économique et que la librairie fasse de même. Car je pense que ces deux secteurs sont à même d'innover même pour vendre du livre papier.

Permaculture éditoriale

Je réagis à l'excellent article de l'auteur de jeu de rôles, Thomas Munier :
http://outsider.rolepod.net/la-permaculture-creative/

Je pense que l'on peut trouver un équilibre entre la démarche jusqu'au boutiste de l'auto édition et le système éditorial. Aujourd'hui, un éditeur essaie de détecter une oeuvre sur laquelle il va capitaliser pour en faire un best seller, il va mettre le paquet au niveau communication, il va en inonder les libraires qui n'en veulent pas forcément. Le best seller doit permettre de compenser les pertes sur des oeuvres plus risquées dont certaines se vendent de manière ridicule.
Un autre système est possible. Notamment pour les littératures de l'imaginaire.
- Déjà on tire chaque ouvrage au même nombre d'exemplaires et la même mise en place. Et si un titre marche mieux que les autres on fait un retirage grâce à l'impression à la demande. Comme ça il n'y aura pas un titre qui étouffera les autres.
- Au niveau de la communication on ne fait pas plus d'efforts pour un titre ou un autre. Pas de favoritisme. Ce que l'on veut c'est qu'ils se vendent tous. Le marketing est fait non pour soutenir des titres mais pour soutenir le travail de l'éditeur dans son ensemble.
- On essaye d'avoir une production la plus éclectique possible. On publie aussi bien de la SF, de la fantasy, du fantastique.
- On ne signe aucun contrat à priori. On fait signer le contrat à l'auteur après acceptation du manuscrit et certainement pas avant le début de l'écriture. Même si l'on commande un titre à un auteur, on attend qu'il ai fini de l'écrire pour signer un contrat ( on se prémunit ainsi contre certains aléas). On ne force jamais un auteur à écrire la suite de ceci, s'il veut faire un break et passer à un autre projet. Le contrat à priori est une violence contre les auteurs. Il les force à se consacrer en priorité à un projet à l'exclusion des autres. Comme ça pas de problème de manuscrit non rendus dans les temps ou ne correspondant pas à ce que veut l'éditeur.
- On essaie d'être présent dans les points de vente les plus éclectiques. La librairie bien sûr mais aussi les maisons de la presse, les bureaux de tabac, les épiceries rurales ( être présent en zone rural là où il n'y pas de librairie ça compte) et pourquoi pas les bars geeks, les boutiques de jeux ou de jeux vidéos, les boutiques geeks.... Bref être là où on peut trouver une clientèle intéressée et pas seulement là où l'on vend des produits culturels. Et pourquoi pas se diffuser en vente en réunion en passant par l'intermédiaire des cafés associatifs ou des lieux alternatifs.

Personne aujourd'hui dans l'édition ne se lance dans cette démarche. Mais au niveau des deux premiers points c'était ce que faisait Fleuve Noir avant les années 90. C'est également comme cela que Harlequin s'est imposé sur le marché de la romance. Ca peut faire réfléchir finalement.

jeudi 9 octobre 2014

Réorientation du marché

On a pu lire cela sur le blog de l'éditeur américain PYR : "We’ve recently heard from independent booksellers that their customers are hungry for science fiction again, despite the predominance of fantasy over these last several years. "
Ce qui est important ici c'est de voir que c'est chez les libraires indépendants qu'est réclamé ce retours de la science fiction. Il est clair que l'édition américaine de l'imaginaire s'était réorienté vers la grande distribution. Le développement de la paranormal romance et de la fantasy urbaine a héroïne orientée vers un public féminin allait dans ce sens. D'autant plus que les librairies indépendantes avaient tendance à disparaître ( surtout dans les malls) et que les chaînes comme Barnes and Noble ou Borders se mettaient à phagocyter le public des centres villes. L'édition américaine s'est détournée du public de la librairie et pensait que l'avenir du livre était le supermarché. Pendant ce temps là on remarquait que la SF résistait bien en Grande Bretagne. Mais voilà en Grande Bretagne les supermarchés ferment et sont progressivement remplacé par des magasins de proximités et la librairie indépendante a encore une place dans le paysage même si ce n'est pas forcément rose avec une conjoncture assez maussade.
Mais voilà que le nombre de librairie indépendante se met à augmenter aux USA (http://www.slate.fr/story/92011/librairies-independantes-lecture) et qu'il faut revenir à une situation normale. Les éditeurs ont commencé déjà à diversifier l'offre en fantasy et l'on sent que la fantasy urbaine à héroïne est en régression. Reste la SF sur lequel on est un peu timide encore malgré un léger frémissement que l'on sent. Mais ça va venir puisque le lectorat la réclame.

En France aussi nous avons connu la réorientation du marché vers la grande distribution avec l'apparition de la bit lit. Et nos rayons de librairie ressemblent de plus en plus à des rayons de supermarchés. La SF et même la fantasy sont de moins en moins visibles au milieu de la masse des parutions de bit lit. Même si les libraires se font plus rares et que chez certains indépendants nos littératures ne sont pas en odeur de sainteté, il ne faudrait pas non plus oublier les maisons de la presse qui semblent avoir reléguées pour les plus importantes d'entre elles les littératures de l'imaginaire à la portion congrue. Donc cette réorientation est peut être ce qui est arrivé de pire aux littératures de l'imaginaire. La SF populaire et la fantasy populaire de qualité se font plus rare et la bit lit envahit nos librairies. Je n'ai rien contre la bit lit et notamment certaines séries de fantasy urbaine qui sont fort respectables. Mais que l'on se sente obligé d'introduire de la paranormal romance (qui devrait être en rayon romance) là je dis non.

mardi 7 octobre 2014

Les espoirs de l'imaginaire : Richard Mespléde

1 Peux tu te présenter en quelques mots ?
J'ai vu le jour dans d'étranges circonstances lors du solstice d'hiver 1975, dans les Landes. Je suis père de famille et exerce actuellement la profession passionnante d'animateur en gérontologie. Mais j'ai une identité secrète, je mène une double vie : j'écris des histoires fantastiques.


2 Comment es-tu arrivé à l'écriture ?

Je dirais plutôt que c'est l'écriture qui est arrivée à moi. Grand lecteur depuis l'âge de dix ans environ (il m'est arrivé de lire jusqu'à trois cent romans par an) mon besoin d'évasion a rapidement orienté mes lectures vers l'imaginaire. Science-fiction, fantasy, horreur, fantastique sous toutes leurs formes... je me suis beaucoup nourri de grands classiques de ces genres comme de bouquins d'auteurs beaucoup moins connus. Et puis, adolescent, j'ai commencé à écrire, pour extérioriser mes démons intérieurs et surtout évacuer un trop-plein d'imagination. Quelques nouvelles et poèmes d'abord, que je faisais lire aux copains lesquels, adeptes de jeux de rôles, y trouvaient parfois l'inspiration, ce qui m'a logiquement encouragé à continuer. Après avoir gagné quelques concours d'écritures qui m'ont permis d'être publié dans de modestes supports (essentiellement des fanzines spécialisés dans les littératures de l'imaginaire et les univers rôlistiques), j'ai contribué, depuis 2007, à des publications plus sérieuses. Notamment le regretté magazine Black Mamba. En 2009, mes textes commencent à apparaître au sommaire d'anthologies aux éditions Sombres Rets et la Porte Littéraire. J'ai écrit en outre une pièce de théâtre et quelques chansons. Voilà, en gros, mon parcours. Celui d'un autodidacte passionné d'imaginaire.


3 Peux tu nous parler de ton projet de cycle "Chroniques de l'Ouroboros" ?

"Le Cycle d'Ouroboros" plus exactement, est né il y a environ vingt ans, à la suite d'un rêve étrange dans lequel j'ai eu la vision de cinq géants gardant cinq portes... Obnubilé par ce songe j'ai commencé à travailler (à l'époque, sur papier puis sur machine à écrire) sur un cycle de romans. Peu à peu les ogres ont disparu, de même que les portes. Je n'ai finalement gardé que le chiffre 5, qui est une icône numérologique et mystique de mon univers.
Pendant environ dix ans j'ai effectué de très nombreuses recherches dans des domaines aussi disparates que la flore amazonienne, la mécanique céleste ou le panthéon de l'Egypte antique afin d'élaborer tout un univers digne de ce nom. Je me suis rendu compte, au fur et à mesure de mes travaux, de l'ampleur du chantier! Lorsqu'on veut donner corps et crédibilité à un univers imaginaire, il convient d'établir de solides fondations, ce qui signifie ne rien laisser au hasard. J'ai recommencé l'écriture du premier roman au moins huit fois, balançant à la poubelle (je le regrette aujourd'hui!) des centaines de pages à chaque fois... Le premier tome de ce projet mégalomaniaque (je crois vraiment qu'on peut le qualifier ainsi, et j'assume mes ambitions) est achevé, mais pas encore publié. J'attends de terminer le deuxième, en réalité, pour le corriger et "lier la sauce" avant de me mettre effectivement en chasse d'un éditeur, car ces deux premiers tomes sont inextricablement mélés. Sans rien dévoiler, je préciserais juste que j'ai fait quelques entorses aux standards des récits de fantasy. En d'autres termes, l'un des buts que je poursuis en écrivant ce cycle est de sortir des sentiers battus : en tant que lecteur, je me rends compte qu'on tombe souvent sur le même schéma en fantasy, et je souhaite m'en démarquer!
Il peut paraître insensé de se dire que j'ai passé 20 ans à travailler sur ce projet alors qu'aujourd'hui le deuxième tome n'est pas encore achevé... Le calcul serait simple pour dire qu'une vie ne suffirait pas à en achever l'oeuvre! D'autant plus que je prévois au moins cinq opus pour considérer cette oeuvre comme achevée... Mais je sais que lorsque j'aurai terminé l'écriture du deuxième tome de cette fresque, les trois autres suivront naturellement très vite. Lorsque les fondations d'une tour, aussi importante soit-elle, sont bien faites, la construction proprement dite se fait naturellement, en un temps restreint. L'univers du "Cycle d'Ouroboros" est vaste, et se décline, outre le cycle susnommé, sous forme de nouvelles, de poèmes, de chansons... Certains de ces textes sont d'ores et déjà publiés, ce qui me permet de faire découvrir l'univers que j'ai créé tout en mesurant la satisfaction et les attentes du lectorat.


4 Tu as collaboré au projet d'univers de fantasy partagé de Mathieu Guibé et Mestr Tom. Que t'as apporté cette expérience ?

A la suite de plusieurs publications de mes textes dans les anthologies de "la Porte Littéraire", Mestr Tom m'a contacté en 2009 pour me proposer d'écrire un roman à quatre mains. Séduit par l'idée, et anticipant les intérêts personnels que nous tirerions d'un tel partenariat, j'ai aussitôt relevé le défi. L'exercice s'est révélé à la fois ardu et enrichissant : écrire un roman à partir d'une histoire et d'un univers qui ne sont pas les miens n'est pas facile a priori. Il a fallu échanger énormément avec Mestr Tom pour rester fidèle à son univers et ses attentes pour, finalement, parvenir à écrire "Sourtha". Satisfait de mon travail, Mestr Tom m'a rapidement proposé d'écrire un autre opus. "Les Terres Promises" a ainsi été publié en 2011. Enfin, notre troisième collaboration sera publiée dans quelques semaines aux éditions Durand Peyrolle. Il s'agit d'un roman de fantasy humoristique, encore un exercice à la fois difficile et riche en apprentissage pour moi!


5 Tu as également en projet un cycle mêlant western et fantasy dont une nouvelle est parue dans le numéro 12 de Outremonde. Peux tu nous en parler plus en détail ?

Je suis passionné de western spaghettis. Les films de Sergio Leone me sont chers, et j'aime puiser mon inspiration en les visionnant ou en écoutant les musiques d'Ennio Morricone, lesquelles bercent mes doigts tandis qu'ils s'acharnent sur le clavier de mon ordinateur. Cela fait de nombreuses années que j'ai entrepris d'écrire une série de textes courts se déroulant pendant la Guerre de Sécession. Il s'agit de nouvelles uchroniques. A un moment donné de cet événement historique, quelque chose s'est produit qui a considérablement changé le monde. Dans mes écrits, cet important conflit ne s'est pas terminé en 1865. Des armées de morts-vivants, de créatures mutantes et d'autres abominations continuent de guerroyer dans un monde où la technologie et le steampunk font loi. J'avoue avoir puisé mon inspiration, outre dans les films de Leone, dans le jeu de rôle Deadlands et l'univers de la Tour Sombre de Stephen King. Au final, je me suis suffisamment écarté de ces sources d'inspiration pour créer un univers totalement nouveau et, il faut l'avouer, désespéré, dans lequel mes personnages n'ont guère plus de chance de survie (ou de conserver leur intégrité psychique) que dans les récits de Lovecraft.
Quelques-unes des nouvelles se déroulant dans cet univers ont d'ores et déjà été publiées. Horizona Dream est parue dans l'Outremonde n°12. Assassin, Pour une poignée de Gueulards, Pour quelques Gueulards de plus ont été publiées dans les anthologies de la Porte Litéraire. Quinte Flush a rejoint le sommaire de l'anthologie "Mystère et Mauvais Genre" chez Sombres Rets... Aujourd'hui, je poursuis l'élaboration d'un recueil compilant ces textes dans le but de le soumettre à un éditeur. Mais je ne m'estime pas encore prêt. Il me reste quelques nouvelles à écrire pour en venir à bout. 2015 est l'objectif que je me suis fixé pour trouver un éditeur à ce recueil.


6 Quels sont tes autres projets littéraires ?
J'en ai beaucoup. Outre le Cycle d'Ouroboros et le recueil de "fantasy-western-horreur-steampunk" dont nous avons déjà parlé, j'envisage d'écrire un polar de science-fiction se déroulant dans une maison de retraite, un survival-horror sans zombies, et au moins une cinquantaine d'autres futur best-sellers! Sans compter mon projet d'écriture d'histoires courtes à quatre mains en cadavrexquis, un recueil de nouvelles dans l'univers du Cycle d'Ouroboros, un autre orienté SF, et des poèmes, des chansons, etc.... La liste est longue, et la vie sera trop courte, j'en ai conscience, pour mener tous ces projets à terme. Mais je continue d'y croire!


vendredi 26 septembre 2014

Tuer le père

La fantasy change. Aujourd'hui le genre veut devenir adulte et pour cela les auteurs ont décidés de tuer le père. Comme dans une famille l'enfant doit s'émanciper par ses goûts de la personnalité de ses parents, il est temps pour le genre d'exister en dehors de ses pères fondateurs. Aujourd'hui les auteurs de fantasy ont décidé de rompre avec l'influence de Tolkien. Tolkien a apporté un décorum et un schéma. Et depuis 2008 le genre part dans d'autres directions : que ce soit le grimm and gritty, le choix de se baser sur des civilisations ou des époques différentes ou encore la création de mondes secondaires plus exotiques ou plus baroques. On se rend compte que la fantasy est à un tournant de son histoire. Cela implique certes d'aller de l'avant mais aussi paradoxalement de se tourner vers le passé. Certains ont décidé de reprendre l'évolution là où elle s'était arrêté lorsque le Seigneur des Anneaux est apparu. Et de fait la sword and sorcery, genre méprisé s'il en est il y a encore dix ans fait son retours.
Même dans la fantasy la plus old school il y a des traitements nouveaux. Et ce n'est pas uniquement la littérature qui est concerné. Il suffit d'aller sur les blogs de certains rôlistes américains et l'on se rend compte que leurs campagnes n'ont plus rien à voir avec le décorum traditionnel de D&D. Aujourd'hui , ce qui est important c'est d'avoir un imaginaire personnel. On joue avec ses influences, on essaie pas d'introduire des éléments Tolkien like juste parce que c'est dans les gènes du genre.
Le lectorat américain suit. Le lectorat français ne semble par contre par encore tout à fait prêt à cette évolution. C'est ce qui explique l'arrêt des séries dont les décorums sont les plus originaux chez Bragelonne ( comme le codex Alera par exemple). Le lecteur français est encore attaché à certains éléments de décorum. Peut être qu'il faut élargir le lectorat à des gens prêt à découvrir d'autres mondes.

mardi 23 septembre 2014

Trash littérature

La trash littérature c'est la forme qu'a prise une partie de la littérature populaire dans les années 60 aux USA et qui est arrivé en Europe du sud dans la décennie suivante et en particulier en France. Littérature appelée aussi, For men fiction, elle était centrée sur le sexe et la violence. Chez nous Gérard de Villiers et ses séides s'y sont particulièrement illustrée. Et à cette époque c'était une littérature pour hommes.
Le retour du pulp dans les années 90 aux USA qui s'est largement infusé dans le thriller (mais la tendance avait commencé dès la fin des 70's et le début des 80's) a permis l'émergence d'une littérature new pulp et l'éditeur traditionnel de la trash lit, Gold Eagle, a largement pulpisé sa production ( avec notamment une série sur une archéologue aventurière écrit sous le house name de Alex Archer). Qu'est devenu la trash lit aujourd'hui. Et bien elle s'est féminisé curieusement. En bit lit  on trouve un certain nombre d'ouvrages mêlant scène sexuellement explicite et violence. Bref ce qui était jusque là l'apanage de la trash lit.
On peut se demander le pourquoi de cette évolution ? Un recul de la condition féminine avec une augmentation des postes précaires pour les femmes ( la trash lit a toujours été une littérature prolétarienne) ? Ca n'explique peut être pas tout. Après tout une partie du public de Gérard de Villiers était un public de cadres. En parallèle de la culture du divertissement, il y a toujours eu des gens qui préférait l'abrutissement. Chez les hommes il s'agissait de mettre en avant la virilité et c'était pour ce type de macho, que la for men fiction a été créé loin de codes du pulp et ses héros idéalisés. Les femmes souhaitent aussi mettre en avant leur part d'ombre et le mauvais coté de leur personnalité. Le fait que la société valorise de manière excessive le sexe et la violence n'est sans doute pas étrangère à la vague du porno paranormal. Mais curieusement on assiste à un recul de l'affirmation des bas instincts dans la littérature masculine ou en tout cas la littérature masculine elle, est en train de disparaître. En tout cas en tant que telle. La subculture de la virilité se trouve surtout dans les milieux de la culture urbaine et celle ci n'a pas encore accouché d'un genre littéraire. Cela explique aussi cela.

lundi 8 septembre 2014

Les littératures de l'imaginaire face à la culture populaire

Il y a quelques mois Stephen Davidson, rédacteur en chef de Amazing Stories, présentait les littératures de l'imaginaire comme le centre de gravité de la culture populaire. On peut considérer que cela est vrai dans une grande majorité des pays développés mais ce n'est pas le cas de la France. En France c'est encore le polar qui occupe cette place comme dans la majorité des pays occidentaux avant les années 70.
La France a connu un phénomène étrange dans les années 80. Le centre de gravité de cette culture populaire s'est déplacé du polar vers le roman de terroir. Curieusement si Denis Tillinac a à l'époque créé l'école de Brive, c'était pour contrer le roman noir et la SF jugés trop à gauche. Il fallait créer une littérature populaire pouvant défendre les idées conservatrices. Il faut dire aussi qu'une partie de la SF et du roman noir avait été instrumentalisé par l'extrême gauche. Mais ça ne représentait pas grand chose commercialement. Donc les années 80 ont vu ce même roman de terroir occuper un espace important de la littérature populaire alors que la SF tout comme le polar entrait en crise. Il a fallu attendre la deuxième moitié des années 90 pour que ces deux littératures reviennent sur le devant de la scène. Et c'est finalement le polar qui l'emportera.
En effet la littérature noire, possédant un fandom peu organisé et peu centralisé, grâce à un travail de conviction dans les manifestations culturelles les plus diverses a fini par l'emporter. La SF se reposant trop sur le travail du fandom qui fait le maximum qu'il peut faire mais ça ne suffit pas. Les fans devraient être un peu plus actif et essayer d'utiliser les manifestations culturelles locales comme tribune.

samedi 16 août 2014

Parcours de lecteurs, parcours de héros

Je me suis fais une réflexion.
Dans la plupart des librairies les littératures de genre dont les littératures de l'imaginaire sont situées au fond du magasin. Leur lecteur sont obligés de traverser l'espace destinée à la littérature blanche, de dépasser le couloir ou l'escalier menant aux livres pratiques, de traverser également l'espace consacré au régionalisme. Tout est fait pour détourner le lecteur de genre de ses genres favoris justement. C'est un peu comme si le libraire avait honte des littératures de genre (mais aussi de la BD ou de la littérature jeunesse).

Par contre imaginons que ces mêmes littératures de genre soient situées à l'entrée du magasin. Dans ce cas on pourrait imaginer un autre parcourt menant des littératures populaires aux littératures ambitieuses. Certains lecteurs de littératures ambitieuse pourraient se procurer des ouvrages populaires en vertus de l'adage qui veut que qui peut le plus puisse aussi le moins. Cette disposition finalement fait penser au parcourt du héros. Le héros en avançant dans son voyage est confronté à des épreuves de plus en plus complexes. Et ici il s'agit d'aller des littératures populaires vers de littératures plus complexes. Mais en même temps on constitue des tentations pour des lecteurs moins acquis à leur cause qui peuvent s'y mettre parce qu'ils vont les trouver sur leur chemins.

mercredi 30 juillet 2014

Le old school revient

C'est la constatation que l'on peut faire si l'on se penche sur ce que va produire le cinéma de SF dans les mois qui viennent. La franchise Star Wars est relancée et un nouveau Mad Max va sortir au cinéma dans les mois qui viennent. Le old school n'épargne pas le milieu des jeux vidéo puisqu'une franchise légendaire des années 80, Elite voit la sortie d'un nouvel opus alors que rien n'était sorti depuis bien longtemps. Sans oublier Metal Hurlant qui se paye une adaptation à la télé.
Ce goût pour le old school est bien connu du milieu des rôlistes qui semblent avoir une fascination pour le pulp et la SF populaire des années 70 / 80. Dans la blogosphère anglophone on ne compte plus les MJ qui parlent des campagnes sword and sorcery ou de science fantasy à l'ancienne. Est ce un régression ? Peut être pas. Après le développement du grim and gritty des années 2000, une partie du public cherche une ambiance plus légère et des auteurs plus décomplexés qui développent un imaginaire à la fois personnel et ultra-populaire. Des auteurs qui ne limitent pas leur imaginaire. Qui se foutent d'écrire de la vraie SF ou de la science fantasy pour peu que ce soit fun. Un imaginaire sans doute plus rock'n roll que celui nous avons aujourd'hui.
Bref ils ont trouvé dans les vieux textes, ce qu'ils ne trouvent plus dans l'imaginaire d'aujourd'hui. Ils appellent de leurs voeux une synthèse entre le coté décomplexé de la SF et la fantasy de la fin des 70 et du début des 80 et la manière d'écrire et les thématiques d'aujourd'hui. Je pense que le mélange est possible et peut prendre.

mardi 29 juillet 2014

Choc esthétique

La SF a subi au cours de son histoire plusieurs chocs esthétiques. Les univers d'hier ne sont plus ceux d'aujourd'hui. Par exemple les années 70 ont amené l'esthétique du rock'n roll dans la littérature de SF.  Et aujourd'hui je crains que la SF n'ai en partie oublié l'importance de cette dimension esthétique.  La SF c'est un peu comme les ordinateurs. Pendant longtemps on ne s'est pas préoccupé du design et Apple est arrivé dans les années 90 et l'on s'est rendu compte que le design était important dans la vente d'un ordinateur.
Il existe donc une dimension esthétique, un véritable design littéraire : l'univers, son ambiance ainsi que les images fortes que l'auteur va installer dans son récit. Les vers des sables de Dune sont inoubliables et totalement indissociables du roman, c'est un élément fort qui appartient au design littéraire de l'oeuvre. Ce qui est rassurant c'est que l'on assiste à un retour de ces éléments chez les jeunes nouvellistes anglo-saxons. Des auteurs comme Yoon Ha Lee, Aliette de Bodard ou Cat Rambo soignent ainsi énormément leur worldbuilding. D'ailleurs cette notion de worldbuilding a resurgi il y a quelques années, disons à la fin des 2000, alors qu'auparavant on en parlait très peu. Le jeune génération est très intéressée par ces processus de création d'univers. Je ne sais pas ce que cela va donner dans l'avenir mais ça laisse présager de bonnes choses, notamment quand certains de ces auteurs passeront au roman (puisqu'ils en ont en chantier).
Certains nouvellistes francophones semblent avoir les même préoccupations : je pense notamment à Sébastien Ruche, Philippe Deniel ou Aurélie Wellenstein mais il y en d'autres également.
Cette dimension esthétique pousse les auteurs à explorer plus avant leur espace mental et à livrer des univers plus personnels. Certes ils ne travaillent pas à partir de rien et puisent largement au pot commun. Mais la manière dont ils agencent les jouets et même les jouets qu'ils sélectionnent font de leur oeuvres quelques choses de personnel, loin des univers interchangeables. En fantasy le processus est largement avancé. Nul doute qu'en science fiction il suivra largement.