mercredi 2 décembre 2015

Nouveau Monde N°8

Un nouveau numéro de Nouveau Monde. Je dois dire que je n'avais pas été convaincu par le précédent et que le gros double hors série pêchait par l'inégalité des textes à son sommaire. Donc je me demandais à quelle sauce on allait être mangé cette fois ci.
Ce numéro est consacré à l'héroïsme, un thème avec lequel on ne peut pas tricher. Et cet héroïsme est présenté sous toute ses facettes, de l'héroïsme accidentel de l'homme ordinaire ( chez Tiphaine Levillain) jusqu'à l'épique ( la nouvelle cyberpunk d'Anne Goulard) en passant par la parodie ( Florence Vedrenne) et des visions un peu plus amères ( chez Anthony Boulanger ou Violette Paquet). Seul le texte de Frank M Monrise m'a paru un peu faible avec son histoire de joueurs de MMO.

Bref un bon numéro de Nouveau Monde. Ce webzine a beau avoir ses défauts, il est quand même une sorte de rayon de soleil dans le paysage du fandom. C'est le seul webzine à avoir choisi une approche pulp qui rappelle souvent le meilleur du Fleuve Noir de la grande époque. Ca m'étonne que l'association Ymaginères qui l'édite ( et qui semble très dynamique en plus) n'ai pas tenté de se rapprocher d'un éditeur comme Rivière Blanche.

vendredi 6 novembre 2015

Les espoirs de l'imaginaire : Laurent Pendarias

1 Pouvez-vous vous présenter en quelque mots ?

Je suis professeur de philosophie et en parallèle je termine ma thèse de doctorat sur la question de l’action dans l’incertitude. J’adorais/j’adore les livres dont vous êtes le héros, les romans, le cinéma, les arts martiaux et les créatures fantastiques.


2 Comment êtes-vous venu à l’écriture ?

J’enseigne la philosophie et, en 2013, j’ai voulu mettre en récits certains concepts pour faciliter l’accès du public à des pensées parfois jugées trop abstraites (par exemple « Je reviendrai » raconte comment Kant affronte un Terminator steampunk avec sa philosophie). Les premiers essais ont convaincu les éditeurs. Depuis, j’ai publié une quarantaine de nouvelles dans divers anthologies, fanzines et webzines, qui ont parfois reçu des distinctions (1er prix ENSTA 2014). Par la suite, j’ai collaboré au développement de jeux vidéo (CrowntakersLoki’s exileUndead Undertaking). Dernièrement nous avons réalisé La onzième horde, un RPG textuel en hommage au roman d’Alain Damasio La Horde du Contrevent.


3 Tu es diplômé en philosophie. Comment la philosophie influe-t-elle sur ta manière d’écrire la SF ou la fantasy ?

La philosophie influe doublement sur ma manière d’écrire. D’abord, ma conception de la création artistique est conditionnée par les analyses des philosophes lus (Alain, Hegel, Nietzsche) et ces derniers ont souvent cherché à démystifier les supercheries en montrant le travail concret.
Ensuite, elle influe directement sur le choix des motifs puisque je prends systématiquement un philosophe, un concept ou une analyse comme sujet d’une nouvelle. Par exemple, De mortuis raconte une attaque de zombies en 1500 et illustre la pensée de Machiavel. Pandémonium peint un monde où les femmes monopolisent le pouvoir, pour mieux traiter la question de l’égalité des sexes. Livreuse vous met dans la peau d’une camionnette intelligente du futur et reprend la critique de libre-arbitre de Nietzsche.

4 Quels sont tes principaux projets littéraires ?

Actuellement nous travaillons sur AEnigma qui n’est pas un projet littéraire au sens classique du terme… mais qui concerne la question de l’écrit…
En 2015, on tend à séparer voire à opposer les univers de la littérature et du jeu vidéo. Pourtant, on pourrait envisager que les deux sont des formes de narration qui partagent plus de points communs que de différences. Au lieu de chercher à gonfler sans cesse les performances techniques des consoles, on pourrait améliorer les scénarii et les contenus proposés.
Cinq écrivains expérimentés (Anthony Boulanger, Jean-Marc Renaudie, Sophie Dabat, Marie Caillet et Yann Quero) rédigent les épisodes d’une histoire que nous programmons sous forme de mini-jeux.
Fugushiman, Veprikov et Capitaine Blue (du collectif Orbesonge) ont réalisé les graphismes et JDB Artist les musiques inédites. Enfin Aurélien « Fox Fiesta » Dos Santos a assuré le level design.
Vous pouvez retrouver le premier épisode à cette adresse :

lundi 12 octobre 2015

Un imaginaire en voie de disparition

Le modèle imposé par Tolkien avec ses créatures et ses codes est vite devenu le coeur de la high fantasy. Et ce au détriment d'un imaginaire plus traditionnel issu notamment du substrat médiéval. Comme le vénérable professeur d'Oxford a réinventé le vieux folklore nordique en le mâtinant d'influence celtique et médiévale, l'on attend encore que quelqu'un vienne récupérer cette matière européenne pour la transcender et lui donner ses lettre de noblesse.
Si tout le monde sait aujourd'hui ce que sont les Elfes ou les Nains, la plupart d'entre n'ont sans doute jamais entendu parler des Panotii, des Cynocéphales, des Sciapodes ou encore des Blemmyes. Autant de créatures qui méritent un scribe pour les faire revivre. Pourtant ces créatures et quelques autres étaient au coeur des récits fantastique de l'homme du moyen âge et ont même accompagné celui de l'homme de la renaissance au même titre que les mythes greco-latins. Elles ont été au centre des livres de merveilles de Jean de Mandeville ou de Gervais de Tilbury. On les trouve dans les chansons de geste et dans les romans (notamment les romans "antiques"). C'est tout une part du patrimoine de l'imaginaire que la fantasy moderne ne s'est pas approprié. Pourtant en tant que patrimoine je pense qu'il faudra bien un jour que les auteurs européens et notamment français le redécouvrent, se le réapproprient pour pouvoir en faire une matière à la base d'un nouveau courant de la high fantasy.
En effet les utilisations de ces créatures et de l'imagerie issue des mirabilia médiévaux est rare en fantasy. Récemment l'américaine Catherynne M Valente a fait d'une Blemmye l'héroïne d'un de ses cycles. Mais à part cela je n'ai pas connaissance d'auteurs qui ont utilisé ces êtres. Le jeu de rôles non plus les a rarement intégré dans les manuels de monstre des jeux médiévaux fantastique.
Peut être que ces êtres et tout cet imaginaire issu du moyen âge, resté vivace parfois jusqu'au 18éme siècle attend son Tolkien. L'auteur qui saura en faire les fondations d'une nouvelle fantasy épique.

vendredi 9 octobre 2015

Les espoirs de l'imaginaire : Frank Cassilis

1 - Peux tu te présenter en quelques mots ?

Je me nomme Franck Cassilis. Passionné d'Histoire et de littérature de l'imaginaire, je viens d'avoir 36 ans. J'écris depuis une bonne dizaine années de la fantasy principalement, mais aussi de la SF durant mon temps libre. J'ai un blog d'auteur où je parle de mon actualité littéraire : fcassilis-auteur.blogspot.com.

2 - Comment es tu arrivé à l’écriture ?

En lisant assidûment depuis l'enfance. J'ai commencé par les Livres dont Vous êtes le Héros (Loup Solitaire, Sorcellerie, Défis Fantastiques...) puis j'ai découvert Tolkien, Eddings, Vance, Moorcock. J'étais fasciné par ces grands récits d'aventures se déroulant dans des mondes imaginaires. Dès l'adolescence, inspiré par ces grands noms, je développais mon propre monde de fantasy. Puis vers 2003, je me suis lancé dans l'écriture de nouvelles dans cet univers et depuis je n'arrête plus.

3 - Tu développes depuis quelques années un univers médiéval fantastique : le Septentrion. Peux-tu nous le présenter ?

C’est le monde imaginaire que j’ai développé depuis l’adolescence. C'est là que se passe la majeure partie de mes intrigues. Le Septentrion connait une évolution historique à travers les millénaires. Plusieurs périodes se sont succédées :
1- les Temps Archaïques (préhistoire dominée par des divinités sauvages)
2- les Temps Anciens (la période des grands empires jusqu'à la chute du dernier d'entre eux, Tuvalia)
3- les Temps Héroïques (époque des royautés barbares jusqu'à l'industrialisation)
4- les Temps Modernes (la période de démesure technologique)
5- les Temps Galactiques (la conquête du cosmos où se côtoient archaïsme et démesure technologique).
C’est ainsi que j’ai écrit, pour ce cycle, des récits de fantasy médiévale, de fantasy antique, de steampunk, de fantasy urbaine, diesel-punk, de space-opera ou science-fantasy.
Dans cet univers, j'ai déjà publié chez L'ivre-Book un novella de fantasy, Les Factions Rivales et une nouvelle dans le E-zine ECCE, Le Médaillon. Bien sûr, j'ai d'autres projets dans cet univers que j'espère faire publier.

4 - Quels sont tes autres projets littéraires ?

D'abord, développer mon univers de fantasy historique, un moyen-âge alternatif où les monstres et les démons existent vraiment. J'ai déjà publié dans le E-zine ECCE un texte dans cet univers, La Tanière du Diable qui narre les aventures du chevalier Gadifer de la Salle contre les démons en royaume de France durant la Guerre de Cent Ans.
Puis, m'atteler à un roman de SF dans l'univers de la nouvelle que j'ai publiée dans l'antho Dimension Système Solaire chez Rivière Blanche, La Folie de l'Espace. Ce serait un mélange de post-apo, d'anticipation et de space-opera. Rien que ça.

Bref, j'ai du pain sur la planche et c'est tant mieux !

lundi 28 septembre 2015

Europulp

L'Europe doit avoir un futur et pour cela il faut qu'elle ait un passé. Il semble qu'en France on l'ai un peu oublié. Alors que le pulp connaît une véritable renaissance en Espagne et qu'il n'ait jamais cessé d'exister en Allemagne, qu'en Grande Bretagne, il relève également la tête, la France reste curieusement à la marge de ce mouvement. Pourtant le pulp à la française continue à exister grâce à des small press comme Rivière Blanche ou Le Carnoplaste. Mais le récit populaire mérite mieux. Mais pour cela encore faudrait - il que l'on reconnaisse que cette littérature populaire européenne ait existé, qu'elle a même été capable d'influencer les pulps américains au début du vingtième siècle.
Des gens comme Serge Lehman, Jean Marc Lofficier ou Xavier Fournier défriche ce riche patrimoine pour le donner aux générations d'aujourd'hui. Enfin reconnectée à l'histoire de sa littérature populaire la France pourra enfin en être fière, se rendre compte qu'elle n'a pas à rougir face aux anglo-saxons.
Un fois que l'on se sera rendu compte qu'elle a été un champ d'expression majeure qui a donné de nombreuses pépites, que l'on a crée des genres et lancés des thèmes nouveaux, un jour ou l'autre il faudra créer un néo-pulp à la Française qui rejoindra la grande famille de l'Europulp.

Car une fois que les traditions pulps nationales auront été ré-éxhumée, il faudra bien dialoguer pour créer un langage populaire littéraire européen qui ait ses codes propres.

dimanche 20 septembre 2015

Eurofuturisme

Dans un article de 2013 sur le défunt site Acta est Fabula, Florent Leenhart avait appelé à la création d’un genre Europunk.
http://europaen-tribune.blogspot.fr/2015/08/europunk.html
Plus que d’un Europunk, c’est un véritable Eurofuturisme que nous devons créer sur le modèle de l’Afrofuturisme.
Dans l’Afrofuturisme un certain nombre d’auteurs noirs mêlent haute technologies et culture et spiritualité africaine pour imaginer un futur possible et positif de l’Afrique. Ce qui est possible pour l’Afrique devrait l’être pour l’Europe. Mêler la technologie à des éléments de culture européenne pour imaginer un avenir positif de l’Europe est presque salutaire, un acte de foi en l’avenir pour imaginer une Europe unie qui crée un modèle bien loin des canons proposés par l’UE d’aujourd’hui. J’ignore ce que peuvent écrire les auteurs Espagnols, Italiens ou Allemand sur thème mais je vois par contre très bien que l’Europe est présentée comme une entité assez négative dans la SF du futur proche construite par les auteurs français. 
La seule exception est Roland C Wagner. En mélangeant un futur où l’Europe arrive à être à la pointe de la société de l’information à la suite de l’éclatement des USA, et à résister aux Technotrans japonaise grâce au modèle des tribus et aux archétypes jungiens, on a là un des rares exemple de cet Eurofuturisme dont je parle plus haut. C’est vrai que les auteurs européens ne sont pas très fiers. Ils avaient imaginé l’Europe comme la puissance de la résistance au néolibéralisme et elle en est devenu le cheval de Troie allant bien plus loin que les USA dans la construction de ce modèle ( dans le même temps les utopies urbaines et alternatives se multiplient aux USA), malgré une résistance des peuples et surtout d’un certain nombres de territoires. Mais ces territoires qui osent l’utopie ou tout du moins bâtir des alternatives crédibles devraient être la source d’inspiration des auteurs pour créer  des spéculations innovantes loin de la grisaille quotidienne que nous apporte l’actualité. 

Imaginer une Europe différente est devenue une urgence, je suis entièrement d’accord avec Florent Leenhart. Mais l’Europunk qui se contente de dénoncer le modèle d’aujourd’hui sur le modèle de ce qu’a été le cyberpunk n’est absolument pas ce sur quoi il faut mettre l’accent. Les auteurs de SF doivent aussi être capable d’apporter l’espoir et pas seulement l’inquiétude en suivant la voie facile de la dystopie. D’autant qu’il y a une Europe qui crée, qui invente, qui cherche et la mettre en avant est une bonne chose. 

mercredi 2 septembre 2015

Riions un peu avec les Sad Puppies

Au mois de mars dernier les Sad Puppies avaient appelé au boycott de l’éditeur Tor, considéré par eux, comme un éditeur gauchiste véhiculant une idéologie politiquement correcte et étant le centre névralgique du prétendu complot des Social Justice Warriors. Mais si l’on observe les signatures de Tor depuis 2010, on trouve deux membres des Puppies : John C Wright et Michael F Flynn. Et ce n’est pas les seuls auteurs conservateurs publiés par l’éditeur américain. Par exemple il continue à sortir les romans de Terry Goodkind. Ou comment se tirer une balle dans le pied.

Quelque part je me demande s’il n’y a pas plus d’auteurs conservateurs publiés par Tor que d’auteurs de gauche publiés par Baen. Si l’on excepte les deux anthologies de John Joseph Adams on serait bien en peine de trouver des auteurs de gauche dans les sorties récentes. Il semblerait toutefois qu’ils commencent à sortir des conservateurs modérés.  Quelque part c’est bien Baen qui a allumé la mèche en publiant des auteurs ultra - conservateurs dans les années qui ont suivi les 11 septembre 2001. Baen avait jusque là, même si bon nombre de ses dirigeants - Jim Baen et John Frenkel, notamment, ne cachaient pas leurs sympathies conservatrices, publiés des auteurs de toutes opinions. (c’est l’éditeur qui a donné sa chance à Melissa Scott, notamment). 

Car non, contrairement à ce qui a été annoncé dans le manifeste des Sad Puppies, cette SF qu’ils écrivent n’est pas de la SF pulp ou de la fantasy pulp. Dans le groupe, il n’y a que Larry Correia qui fait ouvertement du pulp. Les autres écrivent pour la plupart de la SF militaires dans sa déclinaison ultra- conservatrice. L’auteur ayant inspiré les autres étant John Ringo ( même s’il est resté en retrait du mouvement des Puppies). Cette SF militaire à la John Ringo est considérée par Myke Cole comme misogyne et irréaliste. 

Mais à coté de ça le pulp il y a des auteurs qui en écrivent. Mais ce ne sont pas forcément des conservateurs. Curieusement Baen n’a signé aucun des auteurs qui ont sévi dans le webzine Raygun Revival, consacré au space opera pulp. Ce qui veut bien dire que Baen n’avait aucune volonté de privilégier le pulp dans son catalogue (même si il y a quelques auteurs pulps comme Ryk Spoor). Pourtant il y avait un nombre important d’auteurs conservateurs dans le webzine de Bill Snodgrass. Donc s’il voulait publier de la SF pulpy écrite par des conservateurs ils n’auraient eu que l’embarras du choix. Donc cette défense d’une SF pulp par Correia et Torgersen ne tient pas. Et leurs sorties concernant la sword and sorcery qui ne serait plus publiée aujourd’hui est à mourir de rire. Il suffit de regarder le catalogue de Pyr pour s’en convaincre. Il s’agit bien de la défense d’une ligne politique et non de celle d’une ligne littéraire. Et c’est la conséquence des égarements d’un éditeur qui a voulu aller au delà des libertariens et des conservateurs chrétiens habituels. Cette dérive de Baen a conduit au mouvement des Sad Puppies. Ils auraient peut été mieux inspiré de publier du vrai pulp au lieu de SF militaire et militariste.

Les Sad Puppies : l'homme et l'oeuvre

Dans son blog l’éditeur Eric Flint (plutôt à gauche) s’emporte contre les journalistes qui ont un peu vite caricaturé les Sad Puppies.  Selon les journalistes de Wire les récits écrits pas les Puppies parlent d’ingénieurs courageux qui combattent des extraterrestres ou des gouvernements corrompus. 
(source : http://www.ericflint.net/index.php/2015/08/26/do-we-really-have-to-keep-feeding-stupid-and-his-cousin-ignoramus/)
Et il faut reconnaître que Eric Flint a raison de se méfier. Cette description correspond par exemple très bien aux aventures de Jack Brand par John M Whalen. Sauf que Whalen n’est pas un conservateur. Même s’il publiait dans Raygun Revival l’un des webzine de l’éditeur chrétien conservateur Bill Snodgrass. Ce dernier avaitt tenu justement à ouvrir ses webzines à des auteurs d’autres sensibilités. D’ailleurs, Whalen était devenu l’un des slush readers du webzine, dans cette optique d’ouverture. 
Flint justement explique que certains auteurs conservateurs ont largement introduit la diversité dans leurs oeuvres. Mais, il oublie qu’une oeuvre est bien souvent plus intelligente que son auteur. Lovecraft était raciste. Mais la majorité de ses nouvelles n’en font pas mention. Il y a chez Orson Scott Card des propos humanistes et de beaux moments de solidarité humaines. Mais c’est tout de même un conservateur. Un auteur doit parfois prendre des libertés avec sa propre idéologie pour servir le récit. Ce n’est pas l’oeuvre qu’il faut juger mais l’homme. Il cite par exemple Brad Torgersen, en expliquant que son roman The Chaplain’s War est une ode à la tolérance religieuse. Mais le même Brad Torgersen a été violemment critiqué par Myke Cole (peu suspect d’être un Social Justice Warrior) pour ses prises de position vis à vis de l’homosexualité. En effet Torgersen a exprimé le souhait de chasser les homosexuels de l’armée car pour lui l’homosexualité est un comportement immoral. (source : http://mykecole.com/blog/2015/05/an-open-letter-to-chief-warrant-officer-brad-r-torgersen). 
Je ne pense pas que ce soit une bonne idée d’impliquer David Webber dans ce débat. Certes l’auteur est conservateur mais Canadien. Et je ne suis pas sûr que le conservatisme signifie la même chose aux USA et au Canada. 
Quand à John Ringo il est aussi cité par Myke Cole dans une interview donné à Aidan Moher. Il y critique la vision de la femme dans les romans de SF militaire de John Ringo et de l’école qu’il a influencé.
(source : http://aidanmoher.com/blog/featured-article/2014/01/they-didnt-have-to-earn-it-by-myke-cole/).
Quand à Dave Freer, c’est un ami personnel de Eric Flint. On est à la limite de la déontologie. Si l’on sait qu’ils ont consigné des romans ensemble, on a une autre vision de Freer. Même s’il est un supporter des Puppies, il est capable de collaborer avec un auteur ne partageant pas ses opinions. On a là plutôt le portrait d’un conservateur modéré.

Même s’il a raison de mettre les pendules à l’heure, il a le tort de faire des Pupies de pauvres victimes. Et surtout il ne cite que des exemples issus du catalogue Baen. Or Eric Flint est éditeur chez Baen. Il est donc juge et parti. Or Baen n’a pas le monopole des auteurs conservateurs. Même s’il est tentant de parler de ce que l’on connaît le mieux, on aurait quand même aimé qu’il cite des exemples issus de d’autres éditeurs. Bref en voulant démontrer que le procès fait aux puppies est un faux procès il ne démontre finalement pas grand chose et se livre plus à un plaidoyer pro domo qu’autre chose. Chez Baen, il y a des auteurs conservateurs oui mais des auteurs conservateurs propres. Et à juste titre il oublie d’évoquer les Rabid Puppies, Tom Kratman, Michael Z Willamson ou Travis S Taylor. Il n’y avait donc rien à sauver chez eux ? La vision de Flint est à la fois partielle et partiale même si l’on y trouve des éléments extrêmement pertinents, notamment le fait que les Puppies ne sauraient être réduit au suprématisme blanc qui concerne uniquement une minorité d’entre eux.

dimanche 30 août 2015

Culture mondialisée

Sans vraiment que l'on s'en rende compte la culture de l'imaginaire est devenue une culture mondialisée. Cet état de fait vient d'être reconnu de manière spectaculaire par la Worldcon. L'auteur chinois Liu Cixin vient de se voir remettre le Hugo, pour la traduction de son roman Three Body Problem. Et le Hugo de la nouvelle va aussi à une traduction. Celle d'un auteur néerlandais Tomas Olde Heuwelt. Il y a deux ans Pierre Pevel était sur la shortlist de Gemmell Award.
Les Américains traduisent aussi des romans de SF japonais.
Déjà pas mal d'anglophone non anglo-saxons se faisaient remarquer. Ce qui se rajoutait au phénomène des auteurs américains issus des minorité. La SF se développe en Inde, en Chine, dans le monde arabe, en Russie. En Europe la France fait figure de petit poucet tant elle est à la traîne. Et on assiste pas à une montée du genre dans le reste de la francophonie. La faute sans doute à notre exception culturelle.

mardi 25 août 2015

Diversité

Dans les années 90, le roman noir s'est remis à bien marcher après plus d'une décennie de vaches maigres. Si l'on regarde bien on se rend compte que l'on a diversifié le profil des auteurs à l'époque. Chez les auteurs américains on n'hésitait pas publier des afro-américains, des auteurs sudistes, des auteurs juifs new yorkais. Mais également on s'ouvrait aux Sud Américains, aux Italiens, aux Scandinaves.... Et du coté des Francophones on avait des auteurs venus des communautés maghrébines ou antillaises qui commençaient à faire parler d'eux. Si on tire les leçons du succès soudains du roman noir et du thriller qui ont relevé la tête après des années de déclin, on peut se demander si ce ne serait pas la voie à suivre pour la SF.
Les Editions de l'Instant semblent justement faire partie des acteurs qui pensent la même chose. Leur catalogue va s'ouvrir avec Sofia Samatar et Nnedi Okorafor deux auteures anglophones issues de la diversité et énormément talentueuses. Et l'éditeur a des projets pour publier des auteurs malais, italiens, africains..... Donc enfin quelqu'un a compris la voie à suivre.
Mais en même temps un éditeur comme Mnémos prend le risque de publier Nabil Ouali. Donc les choses bougent et la SF et la fantasy vont être des littératures de la diversité - enfin. Mais à la diversité des origines des auteurs va répondre la diversités des thèmes avec de nouveaux sous genres - arcanepunk, silk road fantasy, afro futurisme, eco futurisme, solarpunk... Les deux mouvements se combinant pour donner encore plus de diversité.
Bref le roman noir ne doit pas son succès à son hypothétique séduction du public de la blanche, mais bien à son ouverture.

dimanche 9 août 2015

68 et la culture de l'imaginaire

Le mouvement de 68 aux USA va - t - être un formidable catalyseur pour la popularité des cultures de l'imaginaire. Tolkien et Farmer vont être des maîtres à penser aux cotés de Luther King, Angela Davis ou MacLuhan. Le droit à l'imaginaire est aussi important que d'autres libertés. Bilbo va - t être une des icônes du panthéon hippy. Et ce va - t - être un formidable coup de projecteur pour la fantasy qui se rapproche du milieu du rock'n roll d'abord avec le rock progressif puis le métal.
Ce flirt des milieux contestataires avec la culture de l'imaginaire va finir par engendrer de nombreuses choses l'apparition du jeu de rôles puis celles de nouveaux mouvements : nerds, hackers et surtout geeks. La culture geek est l'héritière de l'esprit contestataire de 68.
68 et le mois de mai, a été aussi un mouvement important en France. Mais là où les Américains ont trouvé des maîtres à penser dans leur propre culture, en France le mouvement est à la fois plus politisée ( référence à Marx, Trotsky ou Mao) et plus terre à terre ( mise en avant du problème de la liberté sexuelle). Les thématiques écologiques, pacifistes ou sociales, essentielles aux USA, n'arriveront que plus tard en fin de mouvement, avec l'implication des travailleurs. Curieusement bon nombre des militants soixante-huitards sont devenus des bobos dix ans plus tard et non des geeks. D'ailleurs ni la SF, ni le rock'n roll ne seront mis en avant par les leaders du mouvement. Même si l'aspect politique était là, l'aspect culturel a été totalement absent. Pas de rencontre entre la contestation sociale et la contre-culture. Cette même contre culture se développera plus tard, notamment rue d'Ulm.  Ce rendez vous manqué explique peut être la faiblesse de la culture de l'imaginaire chez nous. Le basculement des jeunes contestataires gauchistes vers la normalisation sociale, passant du camp des militants à celui des bobos a fini par étouffer les choses dans l'oeuf.

lundi 27 juillet 2015

Subcultures et sous genres

Il y a quelques choses que j'admire chez les anglo-saxons, c'est la facilité avec laquelle ils arrivent à créer de nouveaux sous genres. Hier encore j'apprenais la création du solarpunk, un sous genre d'utopie écologiques voulant décrire des futurs positifs et réalistes. Je ne vois malheureusement rien de tel en France. Même en consultant régulièrement ActuSF, le site de référence, j'ai le plus grand mal à discerner les lignes de fonds du fandom hexagonal. Pourtant en tant que lecteur de webzine, je sais que ça bouge, mais j'ai du mal à voir les différents courants, les différentes obédiences, les différents directions. Comme si les choses manquaient de communication.
Ce que j'admire aussi c'est la possibilité pour un sous genre de donner naissance à une subculture comme ça a été le cas pour le  steampunk et le dieselpunk.
Ces caractéristiques ne sont pas le propre du monde anglo-saxon, on les trouve aussi au Japon. On les voit aussi apparaître depuis peu en Espagne ( je pense que d'autres pays européens sont également concernés mais je connais moins).
Mais en ce qui concerne la France peut être est ce dans la faiblesse de sa contre culture qu'il faut en chercher la cause. La contre culture naît dans les universités. La France a promu le modèle des grandes écoles avant que la démocratisation des universités dans les années 70 et leur développement dans les 80, permette à une  contre culture de naître et de se répandre. Mais il semblerait que de plus en plus de jeunes s'orientent vers les filières sélectives aujourd'hui laissant les universités aujourd'hui. D'ailleurs en France les villes geeks sont celles qui ont les plus grandes universités, ce n'est pas un hasard.
La France a du mal à créer une contre culture qui s'enracine solidement dans le terreau de ses territoires. Et je pense que c'est une handicap pour créer des subcultures purement françaises, des sous genres français alors que paradoxalement on a autant voire plus à dire que les autres.

mercredi 20 mai 2015

Super héros : une mythologie laïque ?

Et si la déferlante des films et séries TV de super héros étaient un symptôme de la sécularisation de la société américaine ?
Force est de reconnaître dans un premier temps que les super héros constituent une mythologie moderne, mais une mythologie débarrassée des oripeaux de la religion. Mais les super héros représentent tout de même des guides moraux. Les récits qui les mettent en scènes évoquent le bien et le mal, et un certain nombre de valeurs morales et sociales. Cette mythologie puise son matériaux dans le riche terreau de la culture populaire. Aux USA il s'agissait de la science fiction, de la fantasy, du fantastique, de l'aventure, du noir.... Et sont venus s'agréger les nouveautés de la culture populaire, enrichissant le matériaux au fil du temps.
Si les super héros passent pour être américains, ils sont nés en France avec le Nyctalope de Jean de la Hire. La première aventure de ce personnage paraît en 1909, soit quatre ans après la loi de séparation de l'église et de l'état. Même si Jean de la Hire était plutôt un conservateur, il est clair que ce type de récit apparaît à un moment où une partie de la population se méfie de la religion et que ces gens là ont tout de même besoin d'une mythologie.
Et cela peut paraître curieux que dans la France laïque les super héros ont eu mauvaise presse dans l'immédiate après guerre. Peut être que justement la France n'était peut être pas si sécularisée que cela. Et l'alliance des catholiques et de communistes qui s'est créé à l'époque n'est peut être pas un hasard. Le communisme est considéré comme une religion par certains sociologue. Même si les comics ont vécu une période difficile dans les années 50, ils connaissent un fort développement dans les années 60 qui correspond à une époque où la culture populaire explose. La société américaine se sécularise ( même si elle reste plus religieuse que la société française). Mais c'est chez les générations  X et Y que ce sentiment laïc est le plus enraciné. C'est dans ces générations que la pratique religieuse décline. Et ces générations sont plus réceptives à cette mythologie (ainsi qu'aux autres mythologies modernes issues de la pop culture). Justement c'est cette mythologie qui les a accompagné dans leur adolescence et qui leur a permis d'acquérir des repères. Et si les super héros commencent à intéresser également en France, c'est aussi pour ça.

dimanche 10 mai 2015

Pour ceux qui ont aimé Jupiter Ascending

Voici une petite liste d'oeuvres pour ceux qui ont aimé Jupiter ascendant et qui souhaitent trouver des ambiances proche.
Il s'agit bien sûr d'une liste non exhaustive et vous êtes encouragés à rajouter d'autres oeuvres en commentaire si vous en voyez.

CJ Cherryh : le cycle de Chanur (J'ai Lu)
Anne McCaffrey : La série Acorna (Pocket)
Anne McCaffrey et Elizabeth Moon : Generation Warrior et sa suite (J'ai lu)

En bande dessinée :

Sillage de Morvan et Buchet ( Delcourt)
Les Naufragés du temps de Forest et Gillon ( les Humanoïdes associés)
Tessa, agent intergalactique de Stéphane Louis ( Soleil)

Il y en a sans doute des tonnes d'autres.

samedi 2 mai 2015

Guerres culturelles

On n'a les guerres culturelle que l'on mérite. Aux USA la polémique autour des Hugo a montré que dans le fandom, existait une guerre entre geeks progressistes et geeks conservateurs. Nous sommes, en France encore, dans une guerre entre geeks et bobos. Les bobos pensant que leur modèle est supérieur à tous les autres. Ce sont eux qui tirent à boulet rouge sur les culture de l'imaginaire dans la presse. Mais il existe une minorité de bobos à l'intérieur du fandom qui pense que la seule manière de développer les littératures de l'imaginaire c'est en les faisant découvrir aux lecteurs de blanche. En face la majorité silencieuse des geeks souhaitent au contraire le dialogue avec les autres média et que l'on s'adresse aux gamers, aux rôlistes et aux autres communautés qui s'intéressent aux autres médias de l'imaginaire.
Si vous me lisez depuis longtemps vous savez dans quel camp je suis.

dimanche 26 avril 2015

Degré de violence

Dans un article de Black Gate, Harold M Page parle de Edmond Hamilton. Et il émet une remarque sibylline où il affirme que les héros de l'auteur de l'âge d'or savait se servir de leur cerveau pour trouver des solutions aux problèmes qu'ils rencontraient au lieu d'user de la puissance de feu de leur vaisseau comme les héros de space opera d'aujourd'hui. (il utilise Honor Harrington de David Weber comme comparaison).
C'est sans doute exagéré mais pas tout à fait faux. L'âge d'or des années 30 jusqu'aux années 60 c'est c'est une génération qui a connu la seconde guerre mondiale puis le Vietnam. Ils étaient sans doute peu enclin à faire parler la poudre. Ca n'a pas empêché Robert Heinlein d'écrire Etoiles Garde à vous. Mais c'est aussi à la même époque que Keith Laumer crée le personnage de Retief, un diplomate. Et ce n'est sans doute pas le seul à avoir mis en scène ce type de personnages. Il est d'ailleurs dommage que la Grande Anthologie de la SF n'ait pas consacré un de ces volumes à ce type de récits ( je suis d'ailleurs preneur de référence sur le thème de la diplomatie interstellaire). C'est vrai qu'à coté de ça en France, à la grande époque du Fleuve seul Jan de Fast avec son Docteur Alan a osé mettre en scène un personnage de diplomate récurrent.
C'est aussi l'époque des enquêteurs et des problem solvers. Et là nous avons de la matière et avons créé des héros aussi intéressant que ceux des anglo-saxons, à commencer par Bruno Coqdor pour Maurice Limat et Setni pour Pierre Barbet.
En tout cas ce qui manque au space opera d'aujourd'hui dominé par la SF militaire, c'est les personnages non violents. Ou en tout cas ceux qui n'usent de violence qu'en cas d'extrême nécessité et  préfèrent des solutions plus pacifiques.

jeudi 23 avril 2015

Se tromper de combat

Vous êtes sans doute au courant de la polémique qui entoure la remise du prix Hugo cette année. Deux groupes de fans conservateurs ont fait passer leurs favoris en force grâce à des listes toute faîtes. L'un de ces groupes, les sad puppies, dirigé par Larry Correia et Brad Togersen est un groupe de conservateurs qui se trompent de combat ( l'autre les Rabid Puppies de Vox Day étant des néofacistes).
La constatation de Togersen et de Correia comme quoi les Hugo ne récompensaient plus de textes populaires à cause d'une cabale de fans progressistes ne tient pas la route. Mais sur le manque de textes populaires aux USA et notamment de space opera il est clair qu'il y a un fond de vérité. Dans le domaine du roman on publie plus de space opera en Grande Bretagne qu'aux USA.
D'un autre côté il est dommage que la SF pulp soit la chasse gardée des écrivains conservateurs. Ils ne sont pourtant pas les seuls à en écrire. Mais Baen Books est l'éditeur qui privilégie ce type de récit et c'est une maison d'éditions conservatrice. Ca n'aide pas non plus. Le deuxième point c'est que l'imaginaire populaire a été phagocyté par la bit lit ( ou l'urban fantasy d'exploitation à héroïne). En 2012 ça représentait presque 70% des publications. Ca a diminué depuis. Mais la publication de ce type de récit s'est faîtes au détriment de la SF populaire et même d'une partie de la fantasy.
Dans le champ du récit court les choses sont plus ouvertes. Il existe des auteurs plutôt old school comme Yoon Ha Lee ou Rachel Sobel par exemple. Mais ce ne sont pas des auteurs conservateurs. Il existe même des auteurs très pulp comme Sean T.M Stiennon, là encore plutôt quelqu'un de progressiste. Et on ne parle même pas de la fantasy "howardienne" que Correia et Togersen défendent. Elle existe avec des auteurs comme Howard Andrew Jones, Chris Willrich ou James Enge. Ce n'est pas encore un courant fort c'est vrai. Mais si l'on compare à la décennie précédente il y a plus d'auteurs publiés dans ce type de fantasy.
Donc ce n'est pas une question d'alignement politique. La SF et la fantasy populaire aujourd'hui sont aussi bien écrite par des conservateurs que des progressistes. Et si les formes populaires semblent délaissées c'est parce que les éditeurs ont d'autres priorités éditoriales. Et il est clair que certaines de ces priorités sont contestables.
Et si l'on veut soutenir la SF et la fantasy populaire se n'est pas en détournant les Hugo qu'on arrivera à quelque chose mais en créant un prix qui sera destiné à la mettre en lumière.

samedi 7 mars 2015

La culture de l'imaginaire et le mur de la ruralité



Quand on essaye de comprendre pourquoi les littératures de l’imaginaire fonctionnent moins bien en France que dans les autres pays occidentaux, on découvre au fil des analyses, des réflexions, des recherches, des observations que la variable cachée pourrait bien être la résistance d’une ruralité conservatrice face à une culture considérée comme innovante et surtout l’agent de l’étranger ( à savoir les USA).

Quand on observe la culture populaire, on se rend compte que de 1979 à 1995 environ, le roman de terroir a été le centre de gravité de la littérature populaire ( alors que dans les autres pays développés on passait du policier aux genres de l’imaginaire). Quand on observe la contreculture l’on se rend compte qu’une partie de son action s’est organisée autour des événements du Larzac ( alors que dans d’autres pays c’est autour des grandes métropoles industrielles).  Aujourd’hui encore  peu d’auteurs ont fait le choix  de vivre en zone rurale ( c’est plus fréquent outre Atlantique ou outre Manche). C’est dans le sud ouest et le centre ouest, où l’on trouve les régions les plus rurales en France que l’on a le moins de manifestations consacrées à l’imaginaire. Bref on sent une opposition nette entre la culture de l’imaginaire et le monde rural.
Mais en creux les cultures de l’imaginaire n’y étaient guère présentes dans les années 50 et 60. L’on se rend compte que les principaux foyers de propagation de la culture de l’imaginaire au cours de cette période ( la librairie de la Balance, le club Futopia, le fanzine Orion) sont des institutions parisiennes. D’ailleurs à l’époque la SF a plus d’influence dans les milieux intellectuels de la capitale que dans la France profonde. Des intellectuels comme Boris Vian ou Roland Barthes s’y intéressent par exemple. Pire la SF et le fantastique se mêlent aux sciences occultes et à l’ésotérisme dans les colonnes de Planète, privant largement ces littératures de l’aura de sérieux qu’elles auraient mérité. La SF et le fantastique étaient donc très implantés dans les milieux parisiens.

Mais il n’en été pas de même en province. Serge Brussolo lorsqu’il évoque son adolescence dans une interview donnée à Bernard Rapp, explique qu’à l’époque la SF n’existait pas en France. Or des collections comme Anticipation ou Présence du Futur étaient déjà là. Des auteurs comme Francis Carsac et Nathalie Henneberg sont déjà établis et la revue Fiction commence à être une institution. Mais pour un adolescent de province comme Serge Brussolo tout cela était difficilement trouvable. L’implantation territoriale du genre était donc pendant longtemps guère optimale. C’est dans les années 70 que les choses changent et que la SF commence à s’installer dans les librairies et bibliothèques de province. Dans les zones rurales ce n’est bien souvent que la collection anticipation qui est trouvable dans les maisons de la presse ( rejointes plus tard par les collections spécialisées de J’ai Lu et de Presse Pocket quand on a la chance d’avoir un libraire un peu ouvert). 

Mais dans ces zones rurales cette même culture va être considérée comme l’ennemi.
La volonté de défendre la vie et la culture rurale d’une minorité passait par le combat contre toutes cultures nouvelles essayant de s’implanter dans le territoire. Il fallait préserver son identité rurale. Mais d’autres gens viennent s’ajouter à ce combat. Au premier rang desquels on trouve des instituteurs qui considèrent la SF comme une culture abrutissante. Ce sont les mêmes qui accusent la BD d’être le vecteur de l’illettrisme. Bref il y a une incompréhension de ces hussards noirs de la république, totalement anachroniques dans les années 70 et 80, qui défendent les valeurs rurales comme base de la construction républicaine et qui ne comprennent pas leur propre époque. Il est vrai que le flirt de la science fiction avec la revue Planète et les milieux ésotériques contribuait à donner une aura sulfureuse à un genre qui ne l’était pas le moins du monde. Et l’ignorance faisait le reste. Le fantastique n’était bien souvent associé qu’au cinéma de série B et les chefs d’oeuvre littéraires du genre étaient totalement inconnus de la population à part peut être d’une poignée d’érudits locaux. C’est aussi à cette époque que l’on met en avant l’argument de la violence tant associée à la SF qu’au fantastique. Il faut remarquer que les instituteurs devaient énormément relayer les opinions de la commission chargée de faire respecter la loi de 1948.
Des notables aussi se sont mis dans la bataille. Eux essayent de préserver leur rôle en tant que têtes pensantes culturelles de leur territoire. Bref cette alliance qui comprenait aussi bien des gens de gauche et de droite, des catholiques et des laïcs, s’est mise en place. Dans bibliothèques souvent  gérées par des bénévoles, le genre était absent. Dans les écoles on disait le plus grand mal de ces illustrés qu’affectionnaient les gamins et bien sûr les genres de l’imaginaire n’étaient pas présents dans les armoires scolaires ( à l’exception notable de Jules Vernes auquel étaient attachées des vertus pédagogiques). 

Curieusement le genre policier ne faisait pas l’objet de cet ostracisme. 
A partir de ces données on peut se demander si le problème n’était pas plus ancien. Dans la France rurale de la première moitié du vingtième siècle, la culture du merveilleux scientifique n’était certainement pas présente, sinon les thématiques d’anticipation et de science fiction auraient été familières d’une partie des ruraux. On peut se dire que les feuilletons publiés dans la presse régionale devaient être surtout policiers et que ça explique que le genre policier ait été installé dans ces territoire et non la SF et le fantastique d’ailleurs. Même si c’est à prendre avec des pincettes ( le travail sur les feuilletons de la presse régionale n’existant pas j’en suis réduit à des conjectures). 

Reste à savoir pourquoi les populations rurales se sont opposées à cette forme de culture. Certes une partie des adeptes de la contre culture étaient très à gauche et il est tentant de penser que les conservateurs ruraux ne partageaient pas leurs valeurs. Ca a peut être joué mais à la marge, surtout pour les notables. Mais la réalité est à chercher ailleurs. Le système de valeurs des cultures de l’imaginaire s’oppose de manière frontale aux valeurs de la ruralité. Les valeurs de l’imaginaire c’est le rêve, l’ouverture d’esprit, la curiosité. Les valeurs rurales c’est le travail, le repli sur soi ( à rapprocher des propos d’un éditeur de romans de terroir qui explique que la plupart des auteurs qu’il a publié n’avaient jamais quitté leur village), l’immobilisme, la survie. D’un coté une société en mouvement, de l’autre un monde statique et fermé. Il faut aussi se souvenir que l’arrivée de la modernité était récente dans le monde rural. Certains hameaux n’avaient eu l’électricité que dans les années 60. La plupart des foyers n’avaient ni téléphone, ni la télévision. Les habitants de ces secteurs cherchaient à défendre leurs valeurs culturelles, la seule chose qui leur restait après l’arrivée des technologies du monde moderne. Et les valeurs rurales sont revenues au devant de la scène dans les années 70. D’abord avec l’utopie du retours à la terre puis avec le développement du roman paysan par l’éditeur Denis Tillinac chez Robert Laffont. 
C’est aussi la lutte du local et de l’international. Les ruraux refermés sur leur propre univers se sont opposés massivement à une culture qui était une fenêtre ouverte sur le monde, une culture sans frontière. Il s’agissait d’une sanctuarisation des valeurs locales contre la mondialisation socioculturelle. On sortait, en effet,  d’une société où les identités étaient plus locales ou régionales que nationales.
Le livre est également sacralisé et sanctuarisé en milieu rural, par les notables notamment. Mais le livre est un objet tellement sacralisé que l’on pensait que certains sujets ne pouvaient être de la littérature. Ce qui explique des thématiques qui sont acceptées au cinéma sont rejetées en littérature. Il faut dire que le livre n’était guère présent dans les familles paysannes et bon nombre de jeunes ruraux découvraient le livre à l’école. Et ce lien avec l’école a construit une relation entre le livre et les choses sérieuses. Et c’est d’autant plus vrai que dans les petites communes les bibliothèques étaient peu accessibles et ne proposaient très souvent pas de romans.


Les ruraux se heurtaient à la volonté des jeunes de vivre dans un monde plus ouvert avec une culture plus diversifiée et surtout qui parlaient à leur imaginaire, les faisaient rêver et les entraînaient loin d’un quotidien morne. 
En fait le mur n’est tombé que dans les années 90 et encore pas durablement. La génération X nourrie aux dessins animés japonais, comics, jeux de rôles s’est appropriée les genres de l’imaginaire et ils ont réussi à finalement installer une tête de pont dans les territoires ruraux. Malheureusement bon nombre de ces jeunes ont dû quitter leur ville ou leur région pour travailler laissant le travail à refaire derrière eux et le mur s’est reformé. Mais dans certains territoires un graine a germé et a permis de créer l’embryon d’un mouvement. Il faudrait qu’une deuxième fois le mur tombe et cette fois ci durablement. Il faut pour cela posséder les bons prescripteurs et médiateurs. Et là ce n’est pas toujours gagné.

Malheureusement la mentalité rurale s’est aussi exportée vers les villes. De nombreux déracinés des campagnes avaient mal vécu l’exode rural. Alors l’arrivée de la littérature de terroir à la fin des années 70 va les reconnecter à leurs vieilles valeurs rurales. D’un autre coté l’admiration pour les notables d’une partie de la classe moyenne va en conduire certains de ses membres à essayer de singer cette culture notabiliaire ( dans un besoin de légitimité). Et cela passera par le mépris de tout ce qui ne rentre pas dans les cases.

Ce qui veut dire que le travail de reconquête s’il doit contribuer à s’établir dans les territoires ruraux, doit également s’intéresser aux populations urbaines. L’on a besoin de communiquer.

mardi 3 mars 2015

L'erreur de Serge Lehman

La théorie de Serge Lehman concernant le rejet du merveilleux scientifique est extrêmement intéressante. Ainsi pour lui, ce rejet serait lié à la réutilisation du mythe du surhomme, l'un des principaux thème utilisé à l'époque, par les Nazis. Et donc la France et l'Europe aurait rejeté ce merveilleux scientifique et serait tourné vers l'influence américaine.
Serge Lehman oublie un facteur. La France d'avant guerre était un pays extrêmement rural. Et même rural dans sa grande majorité. Et cette culture du merveilleux scientifique était surtout répandue dans les grandes villes. Le seul contact des ruraux avec la culture populaire c'était les feuilletons qui paraissaient dans les quotidiens régionaux. Il serait intéressant de voir d'ailleurs quels étaient ces feuilletons pour voir dans quelle mesure le merveilleux scientifique y était présent. Je peux me tromper mais il est probable qu'il y était représenté de manière très faible.
Donc la culture du merveilleux scientifique ne s'est pas enracinée dans la France profonde. Et n'arrivant pas à s'enraciner il n'a pas été oublié, mais il ne représentait rien pour bon nombre de Français. Seule une élite urbaine y avait eu accès et en a perpétué le souvenir.

lundi 2 mars 2015

La réception de la culture populaire

Les nouveautés de la culture populaire ont toujours été attaquées en France. La loi des 1948 sur les publications destinées à la jeunesse a été bien souvent le prétexte utilisé. C'est ainsi que les traductions de comics américains des éditions Lug ont été soumises à la censure. Auparavant le dessinateur Chott avait vu l'interdiction de sa propre BD Fantax. Cette censure issue de l'alliance des catholiques et des communistes visait autant à faire respecter la morale que de faire barrage à la culture américaine. Mais la BD a été à nouveau la cible d'attaque dans les années 80, où le groupe de presse catholique Ampère entend moraliser la BD. Ensuite ce seront les dessins animés japonais, le jeu de rôles et enfin les jeux vidéo qui seront la cible de critiques bien pensantes émanants de la gauche comme de la droite.
Donc la culture populaire a été rejetée en France dans l'après guerre et ce pour des raisons multiples. Mais il existe un autre rejet moins connus. Dans les zones rurales, dans les années 70, la SF et le fantastique étaient violemment combattus par les instituteurs. Pour ceux ci la science fiction n'était que des " élucubrations" (propos réels d'un instituteur). D'ailleurs dans les armoires scolaires ont ne trouvait pas d'oeuvres de science fiction jeunesse ( pourtant dans les années 70 il y en a eu si l'on en croit les articles de Francis Valéry dans Bifrost). Il y avait toutefois une part d'hypocrisie puisque leurs propres enfants lisaient Strange ou regardaient les dessins animés japonais. Derrière cette méfiance d'une partie de l'institution scolaire, il y'a avait, sans doute, la mauvaise image du genre donnée par Planète, revue qui dans ses contenus mélangeait SF et ésotérisme, contribuant à donner une réputation de genre peu sérieux.

dimanche 1 mars 2015

Le dialogue des hétéroclites

Dans les années 60 existe une institution unique : la revue Planète. Dirigée par un touche à tout génial , Jacques Bergier, qui n'a jamais caché sa passion pour les littératures populaires, elle avait le défaut d'être un attrape tout qui disait tout et son contraire. On y trouvait des nouvelles de SF ainsi que des articles critiques sur le genre. Les articles de vulgarisation scientifique y voisinait avec d'autres sur l'ésotérisme, le développement personnel et la spiritualité. Les choses étant bien souvent mises sur le même plan. Par exemple la revue considérait Lovecraft comme un grand initié qui avait entrevu une vérité cachée. Et ça a été une des explication du succès de cet auteur qui fédérait un lectorat bien au delà des lecteurs du seul fantastique.
La revue Planète va disparaître dans les années 70. Mais elle a entraîné autour d'elle un vaste élan. Des clubs Planète vont se créer dans plusieurs villes de France. Et elle a été un des facteur de la vulgarisation de la science fiction. Et cela explique partiellement le succès du genre dans les années 70. Mais également sa chute dans les années 80. Le genre SF s'était lié aux idées hétéroclites et ce n'était plus une littérature des sciences, ni même une littérature philosophique, mais une partie de l'opinion faisait un lien entre le genre et certaines idées ésotériques ( l'ufologie entre autre) ou spirituelles et la SF. Bien sûr ce lien impur était combattu par la majorité du fandom. D'autant plus qu'à l'époque et ce jusqu'aux années 80, on trouvait des romans de SF dans certaines librairies ésotériques. Ce mélange des genres s'il a été dans un premier temps un facteur de développement du genre amenant un nouveau public vers le genre a dans un deuxième temps conduit à un déficit d'image de ce même genre.
Mais on retrouve cette tendance au mélange entre SF et ésotérisme, spiritualité dans les romans de Bernard Werber et ça explique sans doute leur succès. Une grande partie des français étant attiré vers les pseudo sciences et la philosophie new age.

lundi 23 février 2015

Le renouveau des années 90

Le fameux renouveau qu'ont connu les littératures de l'imaginaire dans les années 90 s'explique aisément à travers la grille du dialogue entre les média. Les années 90 sont celles du dialogue avec le milieu du jeu de rôles. Comme je l'ai dit précédemment c'est le milieu du JDR qui s'est rapproché de la SF avec notamment les éditions Mnémos en 1995. Ont suivi Nestiveqnen, Science fiction magazine et aussi la revue Bifrost. Autant d'initiatives créées par des rôlistes. Les choses marchaient également dans l'autre sens puisque Roland C Wagner avait une rubrique de critiques de roman de SF dans Casus Belli, qui a permis à,des nombreux rôlistes de se construire une culture SF.
Les rôlistes ont aussi pesé dans le succès de certaines oeuvres. On sait que les Guerriers du silence de Pierre Bordage ont eu un très bon bouche à oreille dans le milieu des rôlistes et que ça a été un aspect déterminant du succès de l'oeuvre.

Mais dans les années 90 nous avons eu aussi des auteurs fans de comics au premier rang desquels Serge Lehman qui ne l'a jamais caché.

Les années 90 ont été des années de dialogue entre la littérature et les autres média. Ce dialogue s'est estompé dans les années 2000 et notamment après 2005. Si la fantasy a continué a dialoguer avec le JDR, la science fiction s'est recentrée sur elle même. Le dialogue s'est donc délité.
D'autres dialogues et notamment celui des littératures de l'imaginaire et de la culture geek se profile à l'horizon. Malgré les réticences des gens les plus conservateurs du fandom, cette forme de dialogue sera fructueuse espérons le, ramenant les littératures de l'imaginaire sur le devant de la scène.

dimanche 22 février 2015

Quand le dialogue fonctionne

Dans les années 80, la SF française a connu un petit phénomène : Serge Brussolo. Cet auteur a vite rassemblé autour de lui de nombreux lecteurs. Or Brussolo évolue dans une démarche de dialogue, celle de rapprocher la littérature SF et fantasy et le cinéma bis. Il est clair que Serge Brussolo a amené avec lui de nombreux lecteurs habitués du cinéma bis qui voyaient leurs univers être l'objet d'une littérature. Brussolo décontextualisait et recontextualisait les grands thèmes du cinéma bis. On peut citer par exemple ce qu'il a fait avec les Kaiju dans des romans comme Ce qui mordait le ciel ou encore Opération serrures carnivores. Mais il l'a fait avec d'autres thèmes chers aux bisseux et souvent plusieurs thématiques issues de ce cinéma sont reprises dans ses romans.
Brussolo a permis de créer un pont entre cinéma fantastique et SF et d'autres auteurs avec une démarche similaire sont arrivés plus tard dans les années 80 comme Michel Honnaker.

Ce qui veut dire que le dialogue entre littérature et autres média fonctionne ça permet d'avoir des littératures de l'imaginaire qui fonctionnent.

jeudi 5 février 2015

Dialogue dans la culture de l'imaginaire

Au début des années 80 en Grande Bretagne, les éditeurs de jeux de rôles sont venus dans les conventions de SF, montrer leurs produits. Certes c'était une démarche commerciale d'entreprise souhaitant conquérir un marché. Mais cela a aussi rapproché ces deux milieux. D'ailleurs dans le monde anglo-saxons les auteurs issus du jeux de rôles se sont fait connaître dans les années 80. En France c'est dans les années 90 avec la création de Mnémos que le milieu du JDR s'est rapproché de celui de la littérature de l'imaginaire. Et c'est principalement à l'initiative du fandom rôliste. Les initiatives dans l'autre sens étaient plus rares. L'on se souvient de la rubrique inspi de Roland C Wagner dans Casus Belli. Mais à part ça c'était un peu désert. Certes les premiers auteurs issus du JDR sont arrivés plus tard chez nous. Mais que les rôlistes n'étaient pas considérés comme un public intéressant par la plupart des éditeurs c'est assez symptomatique. Il n'y avait guère que Jacques Goimard chez Pocket qui à l'époque avait ouvert grand la port à la fantasy, comprenant le potentiel de ce public. Et il s'est pris une volées de bois vert.

En Grande Bretagne le magazine de BD, 2000AD a inspiré tout une génération d'auteurs, de James Lovegrove à Andy Remic en passant par Richard Morgan, Simon Green, Jon Courtnay Grimmwood, Neal Asher, Richard Calder et quelques autres. En France Métal Hurlant, pourtant magazine emblématique ne donnera pas une école foisonnante de SF punk, rock'n roll, mystico violente.... Certes il y aura Jean Marc Ligny ou Roland C Wagner et deux ou trois autres. Mais ça ne constituait pas une vague de fond. Au contraire à cette époque au lieu de dialoguer avec les lecteurs de Métal Hurlant, l'on lance le groupe Limite, ce que la SF française a donné de plus intellectuel à ce jour. Il faudra attendre 1993 pour voir un cycle univers commencer à paraître ( les Guerriers du Silence de Pierre Bordage) alors que le début des années 80 avait vu paraître l'Incal dans les colonnes de la revue de Jean Pierre Dionnet.


En France on sacralise trop la littérature et on ose pas trop dialoguer avec les autres médias. C'est dommage.

mercredi 4 février 2015

Imaginaire et culture populaire

Steve Davidson écrivait dans Amazing Stories que les littératures de l'imaginaire formaient le coeur de culture populaire dans le monde occidental. Et si l'on est un tant soit peu attentif à notre environnement culturel, on se rend compte qu'en France ce n'est pas le cas. Ca vaut la peine de réfléchir à ce qui est le coeur de la culture populaire en France. Aujourd'hui il s'agit du genre policier. D'ailleurs c'est reconnu largement par les spécialistes de culture en France. Si l'on regarde bien c'était déjà le cas dans les années 70, même si la SF était en phase ascendante à l'époque. Mais entre 1979 et 1995, nous avons vécu une période étrange pendant laquelle le roman de terroir est devenu le coeur de la culture populaire. Tout d'abord Denis Tillinac crée l'école de Brive, pour diffuser une littérature populaire véhiculant des valeurs conservatrices et réagir ainsi contre le roman noir et la SF jugés trop à gauche. Mais derrière le succès du roman de terroir il y a aussi l'utopie du retour à la terre qui a permis à de nombreux jeunes urbains de changer de vie en s'installant comme agriculteur. C'est le télescopage de ces deux éléments qui a permis à ce genre de devenir énorme. Les éditeurs ont créé leurs collections, les small press régionales se sont multipliées. Avec en filigrane, la quête d'identité, et surtout le retours vers la tradition et le refus de la modernité.
Dans les années 80 aussi bien la SF que le polar fonctionnent assez mal. C'est la culture ruraliste qui va devenir pour une quinzaine d'années le centre de gravité de la culture populaire avant que le polar reprenne sa place.
L'imaginaire malgré les efforts des éditeurs spécialisés dans les années 90 n'a pas pu prendre cette place. Après 15 années de contre-temps le status quo s'est réinstallé. D'autant que peut être le fandom a insuffisamment joué la carte du dialogue avec les autres média ( mais cela j'en parlerais dans mon prochain article).

mardi 3 février 2015

Imaginaire et contre culture

La culture de l'imaginaire est étroitement liée à la contre - culture. Mais la contre culture en France est différente de la contre culture américaine. Elle s'est développée plus tard déjà. La contre culture chez les Anglo-saxons est née dans les universités. En France les universités se sont développées assez tard. En 1975 il n'y avait que 9% d'une classe d'âge qui accédait au baccalauréat. C'est donc dans les années 80 que l'université s'est démocratisée. De plus le système français se caractérise par sa dualité universités / grandes écoles. Et il est clair que dans certaines grandes écoles, notamment les écoles de commerce, la contre culture a eu plus de difficultés à percer. Par contre il est vrai que certaines les écoles d'ingénieur entre autres ont vu se développer des activités autour du jeu de rôle ou de la bande dessinée et sont devenues assez vite des creusets pour cette contre culture.
Aux USA, c'est Berkeley qui a été le berceau de la contre culture, une université publique qui accueillait des étudiants issus de la classe moyenne et même des milieux plus modestes. En France c'est l'école normale supérieure de la rue d'Ulm qui a joué ce rôle. On sait notamment que ce vénérable établissement a eu un rôle dans la diffusion du jeu de rôles en France. Nous sommes en présence d'une des écoles les plus élitiste de notre modèle républicain (et en plus un établissement parisien), où certes l'on trouve des étudiants venus de la classe moyenne mais beaucoup plus de la classe moyenne supérieure ou de la classe aisée. Ce n'est donc pas le même public qui a contribué à diffuser cette contre culture.
La contre culture doit aussi beaucoup aux villes ouvrières dans le monde anglo-saxo : Chicago et Detroit pour les USA, Manchester et Liverpool pour la Grande Bretagne. Nous n'avons pas eu l'équivalent. Par contre en France la contre culture a été vite récupérée par les milieux d'extrême gauche et le Larzac a été aussi bien un foyer de contestation politique que culturelle. D'un coté nous avons l'utopie d'enfants d'ouvriers qui souhaitent intégrer les classes moyennes et qui pensent avoir une chance d'y parvenir au moyen de l'art et de la culture et de l'autre ( en France) l'utopie du retour à la terre. Il est clair que le sens est différent. Mais je reviendrais à ce dernier point dans mon prochain billet.

mercredi 28 janvier 2015

Cosplay et littérature

En 2013 paraissait chez l'éditeur américain Pro Se, spécialisé dans le New Pulp, un recueil qui regroupait des aventures d'un personnage appelé The Pulptress. Au départ le personnage est la création d'une cosplayeuse qui participait à des conventions pulps. Aujourd'hui c'est au tour du personnage d'un autre cosplayeur, Peter Pixie, de se voir décliné en prose. Est ce l'avant garde de quelque chose ? Des cosplayeurs qui créent leurs propres personnages, leur background etc... qui les déclinent en licence. C'est très américain, je ne pense pas qu'on verra ce phénomène en France. Mais ça montre le dialogue qui existe entre littérature populaire et le milieu geek en général.

samedi 24 janvier 2015

Les espoirs en 2014 et 2015

Je vous donne des nouvelles des espoirs interviewés sur ce blog depuis 2011. Certains ont été publiés en volume cette année.
Aurélie Wellenstein a publié un recueil de nouvelles chez le Club Présence d'Esprit.
Meddy Ligner a publié son premier roman aux éditions Armada.
Julien Heylbroeck a publié un roman chez ActuSF.
Solenne Pourbaix a publié un roman chez Rivière Blanche ( bon là l'interview était à l'occasion de la sortie du roman en question).
Stéphane Desienne continue sa série Toxic chez Walrus

En 2015 :
Romain Dhussier va publier un roman de fantasy urbaine chez Critic ( une histoire de magicien détective à Hong Kong, ça promet).
Philippe Deniel revient sur le devant de la scène. Il a des nouvelles dans pas moins de trois anthologies en ce début d'année ( dont l'anthologie sur les créatures asiatiques de Voy'el et celle sur le weird western de Rivière Blanche) et une autre dans le fanzine Eclats de Rêves. On espère que ce regain d'activité augure d'un vrai retours en force de cet auteur trop rare.
Stéphane Desienne va commencer une nouvelle série numérique Exil.