lundi 28 septembre 2015

Europulp

L'Europe doit avoir un futur et pour cela il faut qu'elle ait un passé. Il semble qu'en France on l'ai un peu oublié. Alors que le pulp connaît une véritable renaissance en Espagne et qu'il n'ait jamais cessé d'exister en Allemagne, qu'en Grande Bretagne, il relève également la tête, la France reste curieusement à la marge de ce mouvement. Pourtant le pulp à la française continue à exister grâce à des small press comme Rivière Blanche ou Le Carnoplaste. Mais le récit populaire mérite mieux. Mais pour cela encore faudrait - il que l'on reconnaisse que cette littérature populaire européenne ait existé, qu'elle a même été capable d'influencer les pulps américains au début du vingtième siècle.
Des gens comme Serge Lehman, Jean Marc Lofficier ou Xavier Fournier défriche ce riche patrimoine pour le donner aux générations d'aujourd'hui. Enfin reconnectée à l'histoire de sa littérature populaire la France pourra enfin en être fière, se rendre compte qu'elle n'a pas à rougir face aux anglo-saxons.
Un fois que l'on se sera rendu compte qu'elle a été un champ d'expression majeure qui a donné de nombreuses pépites, que l'on a crée des genres et lancés des thèmes nouveaux, un jour ou l'autre il faudra créer un néo-pulp à la Française qui rejoindra la grande famille de l'Europulp.

Car une fois que les traditions pulps nationales auront été ré-éxhumée, il faudra bien dialoguer pour créer un langage populaire littéraire européen qui ait ses codes propres.

dimanche 20 septembre 2015

Eurofuturisme

Dans un article de 2013 sur le défunt site Acta est Fabula, Florent Leenhart avait appelé à la création d’un genre Europunk.
http://europaen-tribune.blogspot.fr/2015/08/europunk.html
Plus que d’un Europunk, c’est un véritable Eurofuturisme que nous devons créer sur le modèle de l’Afrofuturisme.
Dans l’Afrofuturisme un certain nombre d’auteurs noirs mêlent haute technologies et culture et spiritualité africaine pour imaginer un futur possible et positif de l’Afrique. Ce qui est possible pour l’Afrique devrait l’être pour l’Europe. Mêler la technologie à des éléments de culture européenne pour imaginer un avenir positif de l’Europe est presque salutaire, un acte de foi en l’avenir pour imaginer une Europe unie qui crée un modèle bien loin des canons proposés par l’UE d’aujourd’hui. J’ignore ce que peuvent écrire les auteurs Espagnols, Italiens ou Allemand sur thème mais je vois par contre très bien que l’Europe est présentée comme une entité assez négative dans la SF du futur proche construite par les auteurs français. 
La seule exception est Roland C Wagner. En mélangeant un futur où l’Europe arrive à être à la pointe de la société de l’information à la suite de l’éclatement des USA, et à résister aux Technotrans japonaise grâce au modèle des tribus et aux archétypes jungiens, on a là un des rares exemple de cet Eurofuturisme dont je parle plus haut. C’est vrai que les auteurs européens ne sont pas très fiers. Ils avaient imaginé l’Europe comme la puissance de la résistance au néolibéralisme et elle en est devenu le cheval de Troie allant bien plus loin que les USA dans la construction de ce modèle ( dans le même temps les utopies urbaines et alternatives se multiplient aux USA), malgré une résistance des peuples et surtout d’un certain nombres de territoires. Mais ces territoires qui osent l’utopie ou tout du moins bâtir des alternatives crédibles devraient être la source d’inspiration des auteurs pour créer  des spéculations innovantes loin de la grisaille quotidienne que nous apporte l’actualité. 

Imaginer une Europe différente est devenue une urgence, je suis entièrement d’accord avec Florent Leenhart. Mais l’Europunk qui se contente de dénoncer le modèle d’aujourd’hui sur le modèle de ce qu’a été le cyberpunk n’est absolument pas ce sur quoi il faut mettre l’accent. Les auteurs de SF doivent aussi être capable d’apporter l’espoir et pas seulement l’inquiétude en suivant la voie facile de la dystopie. D’autant qu’il y a une Europe qui crée, qui invente, qui cherche et la mettre en avant est une bonne chose. 

mercredi 2 septembre 2015

Riions un peu avec les Sad Puppies

Au mois de mars dernier les Sad Puppies avaient appelé au boycott de l’éditeur Tor, considéré par eux, comme un éditeur gauchiste véhiculant une idéologie politiquement correcte et étant le centre névralgique du prétendu complot des Social Justice Warriors. Mais si l’on observe les signatures de Tor depuis 2010, on trouve deux membres des Puppies : John C Wright et Michael F Flynn. Et ce n’est pas les seuls auteurs conservateurs publiés par l’éditeur américain. Par exemple il continue à sortir les romans de Terry Goodkind. Ou comment se tirer une balle dans le pied.

Quelque part je me demande s’il n’y a pas plus d’auteurs conservateurs publiés par Tor que d’auteurs de gauche publiés par Baen. Si l’on excepte les deux anthologies de John Joseph Adams on serait bien en peine de trouver des auteurs de gauche dans les sorties récentes. Il semblerait toutefois qu’ils commencent à sortir des conservateurs modérés.  Quelque part c’est bien Baen qui a allumé la mèche en publiant des auteurs ultra - conservateurs dans les années qui ont suivi les 11 septembre 2001. Baen avait jusque là, même si bon nombre de ses dirigeants - Jim Baen et John Frenkel, notamment, ne cachaient pas leurs sympathies conservatrices, publiés des auteurs de toutes opinions. (c’est l’éditeur qui a donné sa chance à Melissa Scott, notamment). 

Car non, contrairement à ce qui a été annoncé dans le manifeste des Sad Puppies, cette SF qu’ils écrivent n’est pas de la SF pulp ou de la fantasy pulp. Dans le groupe, il n’y a que Larry Correia qui fait ouvertement du pulp. Les autres écrivent pour la plupart de la SF militaires dans sa déclinaison ultra- conservatrice. L’auteur ayant inspiré les autres étant John Ringo ( même s’il est resté en retrait du mouvement des Puppies). Cette SF militaire à la John Ringo est considérée par Myke Cole comme misogyne et irréaliste. 

Mais à coté de ça le pulp il y a des auteurs qui en écrivent. Mais ce ne sont pas forcément des conservateurs. Curieusement Baen n’a signé aucun des auteurs qui ont sévi dans le webzine Raygun Revival, consacré au space opera pulp. Ce qui veut bien dire que Baen n’avait aucune volonté de privilégier le pulp dans son catalogue (même si il y a quelques auteurs pulps comme Ryk Spoor). Pourtant il y avait un nombre important d’auteurs conservateurs dans le webzine de Bill Snodgrass. Donc s’il voulait publier de la SF pulpy écrite par des conservateurs ils n’auraient eu que l’embarras du choix. Donc cette défense d’une SF pulp par Correia et Torgersen ne tient pas. Et leurs sorties concernant la sword and sorcery qui ne serait plus publiée aujourd’hui est à mourir de rire. Il suffit de regarder le catalogue de Pyr pour s’en convaincre. Il s’agit bien de la défense d’une ligne politique et non de celle d’une ligne littéraire. Et c’est la conséquence des égarements d’un éditeur qui a voulu aller au delà des libertariens et des conservateurs chrétiens habituels. Cette dérive de Baen a conduit au mouvement des Sad Puppies. Ils auraient peut été mieux inspiré de publier du vrai pulp au lieu de SF militaire et militariste.

Les Sad Puppies : l'homme et l'oeuvre

Dans son blog l’éditeur Eric Flint (plutôt à gauche) s’emporte contre les journalistes qui ont un peu vite caricaturé les Sad Puppies.  Selon les journalistes de Wire les récits écrits pas les Puppies parlent d’ingénieurs courageux qui combattent des extraterrestres ou des gouvernements corrompus. 
(source : http://www.ericflint.net/index.php/2015/08/26/do-we-really-have-to-keep-feeding-stupid-and-his-cousin-ignoramus/)
Et il faut reconnaître que Eric Flint a raison de se méfier. Cette description correspond par exemple très bien aux aventures de Jack Brand par John M Whalen. Sauf que Whalen n’est pas un conservateur. Même s’il publiait dans Raygun Revival l’un des webzine de l’éditeur chrétien conservateur Bill Snodgrass. Ce dernier avaitt tenu justement à ouvrir ses webzines à des auteurs d’autres sensibilités. D’ailleurs, Whalen était devenu l’un des slush readers du webzine, dans cette optique d’ouverture. 
Flint justement explique que certains auteurs conservateurs ont largement introduit la diversité dans leurs oeuvres. Mais, il oublie qu’une oeuvre est bien souvent plus intelligente que son auteur. Lovecraft était raciste. Mais la majorité de ses nouvelles n’en font pas mention. Il y a chez Orson Scott Card des propos humanistes et de beaux moments de solidarité humaines. Mais c’est tout de même un conservateur. Un auteur doit parfois prendre des libertés avec sa propre idéologie pour servir le récit. Ce n’est pas l’oeuvre qu’il faut juger mais l’homme. Il cite par exemple Brad Torgersen, en expliquant que son roman The Chaplain’s War est une ode à la tolérance religieuse. Mais le même Brad Torgersen a été violemment critiqué par Myke Cole (peu suspect d’être un Social Justice Warrior) pour ses prises de position vis à vis de l’homosexualité. En effet Torgersen a exprimé le souhait de chasser les homosexuels de l’armée car pour lui l’homosexualité est un comportement immoral. (source : http://mykecole.com/blog/2015/05/an-open-letter-to-chief-warrant-officer-brad-r-torgersen). 
Je ne pense pas que ce soit une bonne idée d’impliquer David Webber dans ce débat. Certes l’auteur est conservateur mais Canadien. Et je ne suis pas sûr que le conservatisme signifie la même chose aux USA et au Canada. 
Quand à John Ringo il est aussi cité par Myke Cole dans une interview donné à Aidan Moher. Il y critique la vision de la femme dans les romans de SF militaire de John Ringo et de l’école qu’il a influencé.
(source : http://aidanmoher.com/blog/featured-article/2014/01/they-didnt-have-to-earn-it-by-myke-cole/).
Quand à Dave Freer, c’est un ami personnel de Eric Flint. On est à la limite de la déontologie. Si l’on sait qu’ils ont consigné des romans ensemble, on a une autre vision de Freer. Même s’il est un supporter des Puppies, il est capable de collaborer avec un auteur ne partageant pas ses opinions. On a là plutôt le portrait d’un conservateur modéré.

Même s’il a raison de mettre les pendules à l’heure, il a le tort de faire des Pupies de pauvres victimes. Et surtout il ne cite que des exemples issus du catalogue Baen. Or Eric Flint est éditeur chez Baen. Il est donc juge et parti. Or Baen n’a pas le monopole des auteurs conservateurs. Même s’il est tentant de parler de ce que l’on connaît le mieux, on aurait quand même aimé qu’il cite des exemples issus de d’autres éditeurs. Bref en voulant démontrer que le procès fait aux puppies est un faux procès il ne démontre finalement pas grand chose et se livre plus à un plaidoyer pro domo qu’autre chose. Chez Baen, il y a des auteurs conservateurs oui mais des auteurs conservateurs propres. Et à juste titre il oublie d’évoquer les Rabid Puppies, Tom Kratman, Michael Z Willamson ou Travis S Taylor. Il n’y avait donc rien à sauver chez eux ? La vision de Flint est à la fois partielle et partiale même si l’on y trouve des éléments extrêmement pertinents, notamment le fait que les Puppies ne sauraient être réduit au suprématisme blanc qui concerne uniquement une minorité d’entre eux.